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Live reports / 15.07.2021

Martha High & the Soul Cookers, New Morning, Paris

2 juillet 2021.

Éloignée de la scène depuis deux bonnes années, pour cause de problèmes de santé puis de pandémie, Martha High ne cache pas son plaisir à retrouver enfin le public, même si, peut-être par coquetterie, elle se demande si sa « vieille voix » va tenir ! Le plaisir est évidemment partagé par les spectateurs : outre que la chanteuse est la première artiste américaine en tournée à jouer au New Morning depuis la réouverture de juin (même si Boney Fields, résident français de longue date, l’a précédée de quelques semaines), la levée la veille de certaines restrictions permet le retour de la piste de danse, et il ne faut que quelques mots à Tony Match, le batteur des Soul Cookers, pour convaincre la foule, restée sagement assise jusqu’ici, d’envahir le dancefloor avant l’arrivée sur scène de la funky diva. 

Ce sont les Soul Cookers, à savoir le batteur Tony Match et l’organiste Leonardo Corradi renforcés par le guitariste Roy Panebianco qui ouvrent la soirée avec deux instrumentaux en mode soul jazz, dont une version efficace du Cold duck time d’Eddie Harris. Si la pertinence de Match et Corradi, entendus régulièrement avec Fred Wesley au sein du trio Generations, n’est plus une découverte, l’ancrage blues, avec quelques tonalités à la Albert Collins, de Panebianco remplace avantageusement les tentations fusionnantes du précédent titulaire du poste, Eric Wakenius.

Longtemps cantonnée à un rôle de choriste de luxe – chez James Brown et Maceo Parker, quand même –, Martha High n’a réellement lancé sa carrière personnelle, en dehors d’un calamiteux album Salsoul en 1979, qu’il n’y a une douzaine d’années, mais s’est depuis créé un répertoire. C’est avec deux titres de son album de 2009 “It’s High Time”, Stay tonight et You need a woman like me qu’elle ouvre sa prestation, avant de présenter deux titres d’un album annoncé pour ce mois de juillet, “I’ve Got My Senses Back” : la chanson titre et Love unconditional. Ce dernier morceau est l’occasion pour la chanteuse de revenir sur la période écoulée, l’inactivité qui en a été la conséquence – une situation inédite pour elle dans une carrière, selon ses propres dires, de 64 ans –, mais aussi sur le rôle qu’a joué sa foi dans cette période, sujet de la chanson. Dans un registre plus léger, un medley Clean up woman / Mr. Big Stuff vient stimuler les danseurs et permet à miss High – comme aurait dit le Godfather – de démontrer que, malgré les années qui passent, elle n’a rien perdu vocalement, pas plus qu’au niveau de la présence scénique et de la danse !

Le temps d’un entracte bien mérité, et le trio revient pour deux titres associés à l’univers brownien, Shake everything you’ve got et Gimme some more. Martha High poursuit sur le même thème avec Gonna have a funky good time avant de faire monter la température de quelques degrés supplémentaires avec un Cold sweat à rallonge, prétexte à quelques coups de gorge à l’ancienne et à un superbe solo de Roy Panebianco. Elle calme ensuite le jeu au plan rythmique, mais pas en termes d’intensité avec le sommet du concert, une version magnifique du Love don’t live here anymore de Rose Royce, un titre qu’elle a longtemps chanté en ouverture des concerts de James Brown mais n’avait jamais encore enregistré jusqu’ici. Avec ce morceau, qui figurera sur son prochain album, elle confirme, au-delà de son aisance incontestable dans un registre funk, le fait qu’elle est aussi une grande chanteuse soul, capable d’incarner les mots riches en émotion d’une chanson qu’elle poursuivra même plusieurs minutes sans micro, avant de revenir au funk pour le final.

En rappel, elle se penche à nouveau sur le passé avec une courte mais percutante version de Showdown, la chanson phare de son album Salsoul. Avec ce retour triomphal, première étape d’une tournée européenne qui passait notamment le lendemain par le théâtre antique de Vienne, Martha High compensait quelque peu la frustration née de l’annulation de la tournée prévue, au printemps 2020, pour promouvoir son dernier album. Espérons qu’il ne faille pas attendre deux ans avant de la revoir sur nos scènes ! 

Texte : Frédéric Adrian
Photos © J-M Rock’n’Blues
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