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Live reports / 05.02.2020

Makaya McCraven + Zoe’s Shanghai, New Morning, Paris

15 janvier 2020.

En quelques années seulement – son premier album personnel date de 2012 –, le batteur Makaya McCraven s’est imposé comme une des figures majeures de la nouvelle scène jazz, à la fois par ses propres disques et par ses collaborations bien choisies, et c’est un New Morning plein à craquer, avec un public jeune – une large proportion de moins de trente ans ! –, qui l’attendait pour son premier passage dans le club.

C’est à Zoe’s Shanghai qu’avait été confiée la charge d’ouvrir la soirée. Habituellement quatuor, le groupe basé à Barcelone s’est présenté en format duo emmené par la chanteuse et guitariste Zoé Renié pour interpréter son répertoire original, avec plusieurs titres extraits du EP “A Mirage (Meant To Last Forever)” paru en mai 2019. Le résultat, entre soul contemporaine et jazz, ne manque pas de charme, surtout quand quelques influences africaines viennent s’y mêler, mais n’a sans doute pas encore atteint sa pleine maturité, ce que le programme de concert ambitieux du groupe ne devrait pas tarder à faire évoluer.

Après un court entracte, Makaya McCraven déboule avec son équipe de pointures, toutes habituées à jouer avec lui (Marquis Hill à la trompette, Irvin Pierce au saxophone, Junius Paul à la basse et à la contrebasse et Joel Ross au vibraphone, xylophone et clavier occasionnel) et dont la cohésion impressionne dès la montée en puissance progressive de l’introduction à base de percussions. Bien que le concert ait été présenté comme un hommage à Gil Scott-Heron – McCraven a été sollicité pour une “réinvention” du dernier album de celui-ci à l’occasion de ses dix ans, dont la sortie est prévue pour début février –, c’est sur son propre répertoire, avec des titres empruntés pour l’essentiel à l’album “Human Beings”, mais aussi à “In The Moment” et à “Where We Come From” que s’articule le concert.

Reposant sur des thèmes facilement mémorisables, souvent joués par les cuivres à l’unisson, mais ne s’interdisant pas des débordements free, des compositions comme Atlantic black ou Black lion sont l’occasion pour les solistes de s’exprimer longuement. Si Hill et Pierce tiennent parfaitement leur rang, c’est Joel Ross, qui joue brillamment des nuances entre vibraphone et xylophone, qui impressionne le plus par sa constante inventivité. McCraven, lui, réserve plutôt ses parties solo aux introductions des morceaux, même s’il s’offre un bel échange rythmique avec le bassiste. En guise d’hommage à Gil Scott-Heron, il faudra se contenter d’une courte version de I’m new here, élégamment introduite par Ross, mais sabotée par le chant atonal de Junius Paul. Le concert proprement dit est relativement court – d’autant que les contraintes de la vie réelle me privent du rappel – mais très intense, l’ensemble confirmant le statut éminent de McCraven au sein des artistes émergents de la scène jazz. 

Texte : Frédéric Adrian
Photo © David Marques

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