Nice Jazz Fest 2024
05.09.2024
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La file d'attente s'étire jusqu'à la rue du Faubourg Saint-Denis. Foule des grands soirs, donc, pour accueillir Lizz Wright qui vient de publier “Freedom & Surrender”, son cinquième album. Mais on ne change pas une entame qui gagne : Fellowship, la chanson-titre de son disque précédent, semble taillée sur mesure. Une envie de partage, une pulsation ancrée dans la terre, une voix gorgée de soleil… Déjà Lizz rayonne, son quartet au diapason. Martin Kolarides, guitare nerveuse, Brannen Temple, batterie retentissante, Nicolas D'Amato, basse colossale et, surprise, assis au Hammond, rien moins que Bobby Sparks, pointure churchy-funky s'il en est. Oui, sur scène Lizz Wright aime un son plus corsé qu'en studio. Et une approche bien rock s'il faut, pour délivrer par exemple un classique de Neil Young, Old man.
Nicolas D'Amato et Bobby Sparks
Rapidement, Lizz tombe la veste et libère ses talons. Si elle ne fera pas honneur au djembé qui lui tendait sa peau, on la sent à l'aise sur la moquette rouge du New Morning. Pas besoin d'en dire beaucoup, la communion avec ses gars irradie la salle bondée. Du nouvel album, elle chante d'abord des ballades feutrées, la très personnelle Somewhere down the mystic et son appropriation du River man de Nick Drake. Une embardée spontanée dans la syncope addictive de My heart, son titre phare de 2008, résonne comme un aperçu de la suite. Une dernière partie de set davantage tournée vers le gospel, la soul, le groove rugueux.
Martin Kolarides, Brannen Temple, Lizz Wright
Pourtant lâché par sa corde de ré, Nicolas D'Amato n'en décoche pas moins une intense intro. Bientôt rejointe par le timbre enveloppant de Lizz, sa basse vrombit des notes grasses, poisseuses. Coming home fait son effet. Walk with me Lord et les nouveaux The new game et Freedom sont autant de moments forts. Si la guitare a les honneurs des solos, bien négociés, Bobby Sparks, par ailleurs assez sobre, n'y va pas de main morte quand vient son tour. Orgue en feu, cabine Leslie en détresse. Ça s'éclate sur scène et on leur pardonne quelques conclusions de morceaux trop longues. D'autant plus que Lizz a plus d'un baume en réserve pour choyer nos tympans. The first time ever I saw your face, cette ballade de Roberta Flack (enregistrée mais finalement non retenue pour “Freedom & Surrender”) lui va à ravir. Et plus encore cette lumineuse relecture de To love somebody des Bee Gees, servie en rappel juste après un impressionnant The nearness of you interprété a cappella. Forcément, le New Morning en redemande à nouveau. Hit the ground laisse alors résonner toute la force tranquille d'une artiste épanouie.
Texte et photos : Nicolas Teurnier