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Hommages / 01.09.2022

Lily Locksmith, l’album posthume

Alors que tous ses fans se réjouissaient de la sortie imminente d’un album complet, après plusieurs EP et singles qui les avaient maintenus en haleine, une terrible nouvelle fut annoncée : Lily Locksmith est décédée fin décembre 2021 des suites d’une hémorragie cérébrale. Elle avait 37 ans.

En 2017, je découvrais son clip No use but o’well. La chanteuse suédoise redynamisait la composition de Chris Ruest grâce à une voix puissante, tout en restant nuancée. Excellemment accompagnée par un quatuor à deux guitares, contrebasse et batterie, elle fit instantanément vibrer en moi la fibre fusionnelle entre rock ‘n’ roll et rhythm and blues et je mis des alerteurs sur les sites concernés pour suivre toutes ses productions.

De son vrai nom Caroline Låås, Lily n’était pas tout à fait une nouvelle venue puisqu’elle avait déjà publié un single sur Enviken Records en 2016. Le succès de ces deux productions fit rapidement naître le projet d’un album complet, sur support vinyle, ce à quoi le groupe s’attela à partir de 2018. Une étape supplémentaire fut franchie en 2020 avec la sortie d’un nouveau single, I don’t need, juste avant la sortie de l’album prévue pour la fin d’année. Tout fut mis en suspens suite à la pandémie et aux confinements qui en ont découlé.

Alors que la sortie de crise redonna espoir aux fans de voir enfin sortir le disque, en même temps qu’organiser des tournées, sa soudaine disparition donna un coup d’arrêt brutal. Avec l’accord de ses proches, Enviken poursuivit le projet de sortie d’album et, après une campagne d’appel à financement, dont le montant fut atteint en à peine deux jours, le produit tant attendu a pu être mis à disposition en juin 2022.

Intitulé simplement “Lily Locksmith”, le disque rassemble seize chansons plus un morceau caché. Sept compositions originales se nichent parmi neuf reprises de Candye Kane, Chris Ruest et Nick Curran pour les contemporaines, Bobby Blue Bland, Mike Pedicin, Little Richard, Big Mama Thornton et Bo Diddley pour les anciennes. La ligne artistique est claire : du rhythm and blues dynamité par un combo resserré façon rock ‘n’ roll, ce qui est implacablement logique.

Dès le premier titre, la voix de Lily en impose. Elle a la puissance mais aussi la modulation qui fait passer les intentions, les émotions, les tensions-détentes. Quand elle reprend Bobby Blue Bland, elle en retrouve l’emphase et la force persuasive. Du côté instrumental, les deux guitares ne sont pas là pour aligner les solos mais pour construire le swing, bien aidées par la rythmique impeccable, et le son, tour à tour éraillé, twangy, vibrant. Les rythmes invitent à la danse, endiablée ou amoureuse.

No use but o’well a toujours la même force, à saisir de suite car le morceau ne dure qu’une minute et cinquante secondes. Catfight, dernier single mis en avant sur les réseaux, est un rock ‘n’ roll solide. Juste après le What do you know about love de Bo Diddley qui clôt officiellement le disque démarre un joli titre caché où Lily chante accompagnée par un seul piano. Forcément émouvant.

Christophe Mourot
Photos © Helen Sjöstrand

• Lily Locksmith : “Lily Locksmith”
Note : ★★★★
Label : Enviken
Sortie : 24 juin 2022