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Live reports / 22.01.2011

LEGENDARY RHYTHM & BLUES CRUISE


Wendell Holmes et Janiva Magness © André Hobus
 

A l’heure où les grands festivals américains disparaissent pour des raisons économiques, une formule inédite et réussie poursuit son sillage contre vents et marées (c’est le moins qu’on puisse attendre d’un paquebot de 2000 passagers) : la Legendary R&B Cruise, vendue un an à l’avance, avec un programme fabuleux à chaque édition, soit en Californie mexicaine au départ de San Diego (USA) ou, comme ici, de Fort Lauderdale, Floride, avec escales colorées et musicales dans les Barbades, les Iles Vierges et les Bermudes. Météo de rêve, plages immaculées, mer d’émeraude et bonne chair pour un public hyper motivé et convivial, uni dans la diversité du blues. Une semaine de concerts, 5 scènes, un piano bar boogie, des jam sessions, des invitations réciproques (oh, voir Rick Estrin faire baver son harmonica chez Bob Margolin – Mac Arnold, quel plaisir !). Bref… le pied marin ! Que la croisière s’amuse !

 

Rick Estrin & The Nightcats. Avec sa bouille de carnaval, des tonalités ironiques et un harmonica traditionnel créatif, le Californien déménage son jump blues en souplesse. A la guitare endiablée : Kid Andersen. Ça pète, de Link Wray à T-Bone Walker en passant par le solo de Baby please don’t go de Them !


Rick Estrin © André Hobus
 


Kid Andersen et Rick Estrin © André Hobus
 

Janiva Magness. Voix sexy modulée et mini-robes moulantes : elle tangue en harmonie avec le bateau, jure que ce ne sont pas ses stilettos. Groupe soudé et retour du guitariste racinien Zach Zunis, déchaîné mais en phase. Chacune des prestations “charnelles” de cette chanteuse mature séduit, à commencer par l’appareil photo.

 
Janiva Magness et Zach Zunis © André Hobus


Janiva Magness © André Hobus
 

Trampled Under Foot. Trio familial (+ claviériste) intéressant. Le batteur commence en homme-orchestre : son frère, guitariste-soliste enchaîne (trop) rock et leur sœur a Janis Joplin comme modèle.

 Big James & The Chicago Playboys. Le chanteur tromboniste de Southern soul dansante, (ex-Little Milton et Johnny Christian), est un régal cuivré à chaque passage. Et quand ils abordent du Willie Dixon ou de l’Otis Rush, ça a du poids !

 
Mike Wheeler, Cleo Cole, Big James © André Hobus

Terrance Simien & The Zydeco Experience. Pieds nus et sourire permanent, son style traditionnel dynamique est une party à elle seule.


Terrance Simien © André Hobus

Bob Margolin with Matt Hill & Mac Arnold. Chicago blues à la Muddy Waters, bien sûr, impeccable à la slide. Mac Arnold et ses basses fabriquées au départ de bidons d’essence représente l’ancrage historique tandis que le jeune Matt Hill, dans le rôle du “sale-gosse-rocker tatoué” déchaîne l’enthousiasme, soit à la solo, soit à la basse, reprenant même d’une manière excessive le  Lemon squeezin’ daddy  de Nappy Brown, fouettant la scène de sa ceinture ou se roulant par terre ! Rick Estrin (hca), Dave Gross (g) (autre poulain de Margolin) et le britannique Todd Sharpville viennent jammer : Muddy, Wolf et Jimmy Reed revivent.

 
Bob Margolin et Matt Hill © André Hobus
 


Mac Arnold © André Hobus
 

Taj Mahal trio. Belles chemises à fleurs et douceur caribéenne participent à son image exotique de folk blues pour croisière.


Taj Mahal © André Hobus
 

 

The Holmes Brothers. Où qu’ils se produisent, leurs prestations forcent l’écoute par les qualités profondes de leur mixité blues-gospel (pensez famille Staples). Le dimanche matin, c’est une véritable congrégation qui les suit, portée par les voix chorales de Janiva Magness (ouah !), Joan Osborne et, excusez du peu, Denise LaSalle ! Un grand moment chaleureux.

 
Wendell Holmes et Janiva Magness © André Hobus


 Popsy Dixon © André Hobus
 


Janiva Magness et Sherman Holmes © André Hobus
 


Wendell Holmes, Joan Osborne et Janiva Magness © André Hobus
 

Debbie Davies. L’ex-protégée d’Albert Collins est une guitariste consommée et une chanteuse convaincante, même s’il lui manque cette petite étincelle qui rendrait son jeu plus excitant. Gina Sicilia (vo), par contre, ne devrait pas quitter les fêtes de village et Dave Gross (g, b, vo), dans le genre néo Duke Robillard, est à la hauteur de son modèle.


Bob Margolin, Dave Gross et Debbie Davies © André Hobus
 


Gina Sicilia et Debbie Davies © André Hobus
 

Sisters of the South. Ce collectif un peu bancal assemblé par Music Maker comprend deux hommes – le pianiste new-yorkais de boogie (!) Dave Keyes et une sorte d’émule de George Thorogood à la slide, Mudcat – permet tout de même de sortir du purisme habituel du label. Si les vocaux plaintifs de Pura Fe', en surimpression de ses propres a cappella pré-enregistrés, me laissent froid, en revanche Pat “Mother Blues” Cohen et Sweet Betty sont de solides chanteuses gospelisantes dans un répertoire passe-partout tandis qu’Albert White (g) assume blues sans grande flamme. Lil’ Joe Burton ajoute son trombone.


Albert White et Pat “Mother Blues” Cohen © André Hobus
 


Sweet Betty et Lil' Joe Burton © André Hobus
 

Jon Cleary Trio. Estampillé “R & B de La Nouvelle-Orléans”, l’expatrié britannique est effectivement un maître de la “second line” pianistique, ici moins dérivée jazz que dans certains disques antérieurs. Un régal, d’autant plus que sa section rythmique à contrebasse est impeccable.


Jon Cleary © André Hobus
 

Dion (vo, g) Eh oui, l’ex-rocker R’n’B vocal du Bronx s’est reconverti avec succès en country blues semi-amplifié. Le public raffole de ses anecdotes, dont celles concernant Buddy Holly, avec qui il partagea l’affiche, en compagnie de son groupe, The Belmonts, lors de sa dernière tournée fatale.


Dion © André Hobus
 

The Legendary R’n’B Revue. Ou Tommy Castro et ses invités. Après une mise en bouche à la Albert Collins, se succèdent : Magic Dick, ex co-star du J. Geils band, en harmoniciste baveux ; la petite et menue Deanna Bogart est un show déménageant à elle seule (p, vo, s) ; quelle dynamique ! Enfin, Michael Burks (vo, g) marque l’ensemble de son poids Albert King, ainsi que toutes ses autres interventions. Quant au Tommy Castro Band (dont le ténor Keith Crossan), dans une prestation à part entière, il propose son propre répertoire soul blues dansant, très pro et excitant, plus qu’en CD.


Tommy Castro
© André Hobus
 


Michael Burks © André Hobus
 


Magic Dick © André Hobus
 


Keith Crossan © André Hobus
 


Deanna Bogart et Michael Burks © André Hobus
 


Tommy Castro, Scot Sutherland et Michael Burks © André Hobus
 

Zac Harmon Band. “Out” son bon harmoniciste, “in” le volume rock surdimensionné de sa guitare. C’est nuisible à son expressivité.

Denise LaSalle (vo). Chitlin’ circuit dans toute son autorité, très afro-américain et textes communautaires, entre le “double entendre” et l’église. Orchestre cuivré impeccable.


Denise LaSalle © André Hobus
 

John Mooney. Un des maîtres solistes du bottleneck Delta, associé au chaloupé New Orleans.


  John Mooney © André Hobus
 

Au piano bar, baptisé “Club 88”, haut lieu de la grivoiserie after hours – mais personne n’oserait afficher son alcoolémie (pas comme chez nous !) –, le clavier, support de cocktails, alcools et vins divers, voit défiler des champions du style. Mitch Woods, jovial, malgré une phalange cassée, est toujours à l’aise en Fats Domino-Professor Longhair ; Cheryl Renee, une pétulante afro-américaine au touché barrelhouse ; Dave Keyes, avec le boogie-woogie traditionnel comme marque de fabrique et, surtout, Eden Brent, formée dans tous les juke joints du Mississippi et de Memphis, culottée – enfin, façon de parler – dans ses robes moulantes, torride, vulgaire mais oh combien “vraie garce” de beuglant qui met en poche les noctambules ravis dès les premières répliques. Elle a de la gueule, de la voix et aucun disque ne traduit cette ambiance “Storyville” de bordel. Enfin, Mitch Woods rassemblera tout ce que le paquebot compte de pianistes en un mémorable Boogie woogie blow out sur la grande scène.


Mitch Woods et Dave Keyes © André Hobus
 


 Cheryl Renee © André Hobus
 


 Eden Brent et Cheryl Renee © André Hobus
 

Citons aussi Matt Andersen (vo, g), Phil Wiggins & Corey Harris, Kenny Wayne Sheperd, Ronnie Baker Brooks (avec papa Lonnie !). Et des concerts pendant les escales ! En avant-programme, la veille, la Société de Blues du Sud Floride avait organisé le concert de départ, avec Piano Bob & friends, les dynamiques Reverend Raven & The Chain Smokin’ Altar Boys, (quel ténor !) et Bryan Lee égal à lui-même. Au fou !

C’est du bonheur à l’état pur, l’organisation logistique étant à la hauteur.
André Hobus


 Phil Wiggins & Corey Harris © André Hobus
 


Ronnie Baker Brooks et Lonnie Brooks © André Hobus


Reverend Raven & The Chain Smokin’ Altar Boys © André Hobus
 


Bryan Lee © André Hobus