Cherise, Pop-Up du Label, Paris, 2024
09.12.2024
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Il y a bien longtemps que je n'avais pas vu et entendu Karim Albert Kook. En fait, depuis la fermeture du One Way, ce vrai juke joint des Puces de Saint-Ouen où la communauté blues parisienne pouvait se retrouver chaque week-end. Et qui nous manque ! C'est mon ami Larry Benicewicz, de passage à Paris, qui m'a signalé la présence de Karim dans une brasserie du 13e arrondissement. À 19 heures 30, la salle est pleine – restaurant et bar –, et ça joue déjà. Et ça va jouer toute la soirée, jusqu'à minuit, avec deux ou trois courtes pauses, histoire de passer le chapeau. Karim est un chanteur plein d'ardeur, la voix forte et bien placée, et un guitariste excitant, qui ne s'éloigne jamais de l'idiome du blues. Le répertoire puise dans les standards et ses propres compos, il passe de l'anglais au français avec naturel, quelquefois au cours du même morceau. De son fauteuil roulant, il a l'œil à tout et dirige un groupe inattendu. La rythmique est implacable avec la basse de Lev Levy et la batterie de Félix Sabal-Leeco. Ce Franco-Camerounais, qui a bossé pour Manu Dibango et plusieurs fois pour Prince (en concert privé), m'a épaté par sa frappe justement dosée et ses relances opportunes. Mais ce qui confère une touche spéciale au groupe, c'est la présence d'un percussionniste maghrébin (dont je n'ai pas retenu le nom) dont la darbouka ou les karkabous (castagnettes gnawa) apportent au blues de Karim une fragrance orientale originale et bienvenue. Karim est un adepte de la slide et quand il reprend Dust my broom, il évoque à la fois Elmore James pour la souplesse et Hound Dog Taylor pour l'engagement. Le public n'est pas ce qu'on appelle un “public averti”, mais il réagit, participe, encourage de musiciens. Comme dans les clubs de quartier aux États-Unis ! L'interaction est évidente, les musiciens sont stimulés et visiblement épanouis !
Les organisateurs de concerts et de festivals devraient penser plus souvent à Karim Albert Kook, il est toujours sur la brèche et n'a peut-être jamais été aussi bon !
Texte et photos : Jacques Périn