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Live reports / 04.07.2022

Joy Crookes, La Gaité Lyrique, Paris

27 mai 2022.

C’est I don’t mind, premier titre de son album “Skin“ (2021), qui est également la première chanson de la soirée. Joy Crookes apparaît doucement, montant les marches qui la conduisent devant une assemblée déjà captivée. La chaleur du public – comme celle de la Gaité Lyrique, avant-goût d’été – annonce un public prêt à faire honneur à la chanteuse et à son groupe, qui terminent avec cette date parisienne leur tournée européenne.

La première partie assurée par Rasharn Powell reçoit un très bon accueil. Entre un R&B à la limite du  mielleux et des chansons d’amour aux accents hip-hop, le Londonien a su remplir sa mission, annoncée dès son arrivée sur scène, de « warm up » la salle pour la préparer au concert de sa compatriote. Une bonne demi-heure plus tard, c’est chose faite.

Rasharn Powell
Joy Crookes

Joy Crookes déroule plusieurs titres de “Skin“, accompagnée par quatre musiciens : guitare, basse, claviers, batterie. C’est seule, cependant, qu’elle interprète un très joli piano-voix sur le titre éponyme, comme pour mettre l’accent sur les paroles de cette ballade : « The skin that you’re given, was made to be lived in / You’ve got a life worth living. »

Joy Crookes échange beaucoup avec le public, plutôt réceptif à ses blagues et ses tentatives d’apprendre quelques mots de français. Après une trentaine de minutes, la chanteuse loue la dernière sortie de Kendrick Lamar et reprend deux titres (Yah et Element) du rappeur américain issus de “Damn” (2017). C’est une belle surprise pour la majorité du public, mais les fans les plus anciens reconnaissent cette double cover, publiée par la Londonienne en 2019. Cela marque un tournant plus politique dans le déroulé du concert : Joy Crookes poursuit avec Power, un titre dédié à ses « pussy-sisters ». Puis, c’est l’intro de Kingdom qui résonne dans la Gaité, précédée de quelques moqueries sur l’actuel gouvernement britannique.

La conclusion arrive rapidement : le single Feet don’t fail me now met fin à un set d’à peine une heure, qu’une grande partie du public juge trop court. Mais les lumières ne se rallument pas, et Joy Crookes est rapidement de retour pour un bis prévisible, d’abord seule au piano avec Theek ache, puis rejointe par ses musiciens sur Two nights. Le refrain de When you were mine, dernier morceau de la soirée, est repris en boucle, faisant durer les danses du public sur les cuivres de ce titre aux touches highlife, inspiré à Joy Crookes par Ebo Taylor.

Sachant qu’elle est venue défendre son tout premier LP, la courte durée de ce concert n’est pas si surprenante. Néanmoins, on peut noter – et regretter ! – l’absence de plusieurs morceaux sortis ces dernières années sur les plateformes et qui ont contribué à faire connaître la Britannique, notamment Mother may I sleep with danger dont la version interprétée pour Colors a dépassé les 11 millions de vues sur YouTube.

Doublement nommée aux Brit Awards 2022 (Best New Artist, Best R&B Act), Joy Crookes peut compter sur ses musiciens pour soutenir son interprétation de ce premier album très personnel. Elle semble d’ailleurs être plus à l’aise en leur présence que seule sur scène. Ce soir, on a très bien ressenti l’importance de ses textes évoquant la famille, la culture et les combats d’une jeune Londonienne (l’absence du douloureux Unlearn you, seul titre de l’album manquant à l’appel ce soir, se comprend aussi en ce sens), tout en ayant assisté à un concert enjoué et dansant. Un savant mélange, un beau métissage, à l’image de “Skin“ et de son interprète.

Texte : Kiessée Domart-N’Sondé
Photos © Frédéric Ragot