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Live reports / 28.10.2018

Jon Batiste

Dans le cadre de la sortie de son nouvel album “Hollywood Africans”, Jon Batiste a eu droit à sa première tournée solo de quatre dates en Europe (Paris, Amsterdam, Berlin et Londres), choisissant un dispositif remarquable, pour une trop courte heure de prestation, seul au piano et au chant au centre de la cathédrale américaine plongée dans le noir. Ayant déclaré vouloir faire de son show « une séance de méditation qui ne débouche pas sur l’accablement mais sur l’espoir », il surprend par le traitement réservé à deux scies généralement associées à la “good times music” : un When the Saintsen mode lugubre et un What a beautiful world au traitement métronomique et plutôt angoissant.

 

 

 

 

Nonobstant une inutile (mais brève) apparition de son melodica devenu sa marque de fabrique et qu’il appelle un « harmonaboard », il se révèle un pianiste époustouflant à la formidable maîtrise technique. Ce crooner à la Nat King Cole excelle dans les genres pianistiques les plus variés, avec notamment un délicieux Chopinesque qui commence avec des notes classiquement cristallines, s’inspire ensuite de Louis Moreau Gottschalk et sur lequel, soudain, il ne peut s’empêcher de plaquer quelques riffs à la Professor Longhair ! Car notre homme, devenu chouchou de la scène new-yorkaise, correspond bien à l’adage “you can take me out of New Orleans but you can’t take New Orleans out of me”, que l’on pourrait traduire par “chassez le naturel, il revient au galop”. Parfaite illustration de cela, son vrombissant Kenner boogie (du nom de sa banlieue néo-orléanaise natale), hommage à ses grands prédécesseurs, Champion Jack Dupree, Professor Longhair, Fats Domino et même Jerry Lee Lewis.

 

 

 

 

 

Chef-d’œuvre de la soirée, son St James Infirmary blues, meilleure version jamais entendue de ce classique, laquelle nous plonge irrésistiblement dans les second lines funéraires de Nola et le rythme particulier des “pas chassés” des grand marshallsceints de leur écharpe de couleur.  

Jean-Pierre Bruneau
Photos © Frédéric Ragot