Brittany Davis, Black Thunder
24.07.2025
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Certaines rencontres paraissent si évidentes qu’on se demande pourquoi elles ne se sont pas concrétisées plus tôt. On ne sera donc pas surpris d’apprendre que les deux enfants terribles du boogie électrique, JD Simo (qui développe sans concession une carrière personnelle de plus en plus passionnante) et Luther Dickinson (North Mississippi Allstars, Black Crowes…) s’entendent comme larrons en foire pour dérouiller (comprendre : désosser, remodeler, transfigurer) quelques standards tirés de leurs collections de disques personnelles.
Le processus d’appropriation est total : même les fans du grand Bobby Charles auront peine à reconnaître Street people, lacérée à coups de slide rageurs. Les sept autres titres sont à l’avenant : un groove mid-tempo massif et hyperfunky délivré par le batteur Adam Abrashoff (fidèle compagnon de route de Simo), un tapis de basse assassine, un entrelacs de riffs épais et grondants gonflés à la fuzz, des chorus fiévreux et menaçants, un chant fruste et saturé. À l’image de leurs aînés Kimbrough, Burnside et Hooker (repris quatre fois ici, dont deux pour le premier), leurs “chansons” étirées sur un accord installent un climat hypnotique et obsédant. On est proche de la transe et de l’esthétique free, notamment dans leur volonté d’improviser en totale liberté sur des bribes de morceaux réduits à leur plus simple expression, canevas immaculés propices à toutes les digressions.
Les titres ont été captés dans le home studio nashvillien de Simo, dans les conditions du live, en une prise, sans overdub, ce qui renforce le caractère rêche, sale et sans fioriture du son. Bien qu’exigeante, cette quête de la dissonance frôlant par endroits l’atonalité et l’arythmie (Peaches, hallucinante cavalcade malaxée sur près de dix minutes) se révèle particulièrement addictive.
Ulrick Parfum
Note : ★★★★
Label : Forty Below
Sortie : 20 septembre 2024