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Live reports / 16.08.2018

Jazz à Juan

Mercredi 18 juillet

Plus de 26000 spectateurs ont assisté à la 58eédition de Jazz à Juan dont le succès se maintient au cours des ans. Une des raisons de cette réussite tient à la qualité d’une programmation éclectique propre à satisfaire le plus grand nombre sans tomber dans des concessions commerciales majeures. Ainsi, le 18 juillet, les amateurs ne pouvaient qu’apprécier Chick Corea et son Akoustic Band qui perpétuent la tradition des grands trios de l’histoire du jazz. Débutant par Morning sprite et Japanese waltz, le pianiste, qui était venu à Juan avec Miles Davis en 1969, n’a rien perdu de ses qualités. Son jeu conserve toute sa force rythmique et son intelligence musicale lui permet de s’approprier avec élégance le classique ellingtonien In a sentimental mood. Une impression confirmée par sa version de You and the night and the music, un standard des années trente,et une improvisation sur une sonate de Scarlatti. Ses complices, le contrebassiste John Patitucci, auteur d’un beau solo à l’archet sur In a sentimental mood, et le batteur Dave Weckl se sont montrés à leur meilleur niveau.

 


Chick Corea, John Patitucci, Dave Weckl.

 

 

 

Leur succédait David Sanborn, un autre habitué des lieux. Cet admirateur de Miles Davis et de Marcus Miller s'est adressé au public pour féliciter la France d’avoir accueilli Sidney Bechet. Après un début hésitant marqué par sa prédilection pour le smooth jazz, Sanborn a trouvé un régime de croisière plus vigoureux en s’appuyant sur ses racines jazz et rhythm and blues. Sa formation dans laquelle officient une section rythmique de qualité et le tromboniste Wycliffe Gordon dont le style fluide et puissant est un régal (Spanish girl), a fourni une prestation de qualité.

 


David Sanborn

 

Jeudi 19 juillet

Le lendemain, place au Multiquarium Big Band de Charlier et Sourisse pour un hommage à Jaco Pastorius avec, dans le rôle du maître, Bireli Lagrène à la basse électrique sans frettes. Évitant tout mimétisme musical, Biréli a évoqué la carrière discographique de son héros en interprétant avec brio The chickende Pee Wee Ellis, Barbary coastContinuum, de l’album “Jaco Pastorius”, et Palladium, la célèbre composion de Wayne Shorter. Constitué des meilleurs musiciens de la scène du jazz hexagonal, le Multiquarium Big Band a proposé un discours musical digne de ce brillant hommage.

 


Biréli Lagrène et le Multiquarium Big Band

 

 

Vint ensuite Marcus Miller, un autre grand artiste de la basse électrique, qui a évoqué la mémoire de son père décédé il y a quelques mois en lui dédiant Preacher’s kid, un thème churchy interprété à la clarinette basse avec une émotion rayonnante d’humanité. Ont suivi des titres de son dernier album intitulé “Laid Black” puisant dans le gospel, la soul et le jazz (Sublimity). Invitée pour l’occasion, la chanteuse Selah Sue a revisité à la sauce soul et de fort belle manière, Que sera sera, le classique de Doris Day.

 


Marcus Miller, Selah Sue

 

 

Vendredi 20 juillet

Débutant la soirée du 20 juillet, la chanteuse Youn Sun Nah, que l’on voit programmée dans tous les grands festivals de la scène hexagonale, a utilisé avec brio des ressources vocales conséquentes qui lui permettent de passer du soupir au cri et du grave à l’aigu sans effort. Son allure juvénile, particulièrement apparente quand elle dialogue avec son auditoire tombé sous le charme de son charisme, un éclectisme de bon aloi et l’accompagnement sur mesure distillé par des musiciens de grande classe ont emporté l’adhésion du public prêt à la suivre dans ses aventures musicales.

 


Youn Sun Nah, Brad Christopher Jones, Tomek Miremowski, Dan Rieser

 

 

Mêlant l’Afrique, l’Orient et l’Europe, Ibrahim Maalouf et Angélique Kidjo ont évoqué, avec le soutien de l'Orchestre de Cannes Provence Alpes Côte d’Azur, sept énigmes – le public disposait des questions et des réponse – posées par la reine de Saba au roi Salomon pour tester son discernement. Cette création, due à l’imagination d’Ibrahim Maalouf, s’est révélée une opération de crossoverréussie grâce au talent des intervenants.

 


Ibrahim Maalouf, Angélique Kidjo et l’Orchestre de Cannes Provence Alpes Côte d’Azur

 

 

Rendez-vous pris pour la 59édition du festival qui aura lieu du 12 au 21 juillet 2019.

Alain Tomas
Photos © Gilles Lefrancq / OTC Antibes Juan-lesPins