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Live reports / 27.07.2021

Jazz à Juan 2021

Vendredi 9 juillet

Kenny Barron All-Star Quartet  
Kenny Barron (p), Peter Washington (b), Johnathan Blake (dm), Steve Nelson (vib).

Avishai Cohen Trio
Avishai Cohen (b), Elchin Shirinov (piano), Roni Kaspi (dm).

Après un hommage de Philippe Baute, le directeur de Jazz à Juan, à Jean-René Palacio, qui assura de main de maître la programmation du festival pendant dix ans, il revenait au quartet de Kenny Barron d’ouvrir cette 60e édition dont la programmation reprenait pour moitié celle de l’édition 2020 qui n’eut pas lieu pour cause de Covid. Accompagné par le contrebassiste Peter Washington et le batteur Johnathan Blake, Kenny Barron mit en valeur un répertoire où des standards (Body and soul) voisinaient  avec des compositions de Thelonious Monk (Monk’s dream) et des thèmes de Duke Ellington et Billy Strayhorn. Il démontra qu’il restait à soixante-seize ans un pianiste d’exception dont le jeu présente les plus belles qualités : phrasé d’une grande sûreté, technique hors pair, inspiration constante. Son entente avec le vibraphoniste Steve Nelson fut totale et le soutien de la section rythmique au-dessus de tout éloge. 

Puis Avishai Cohen entra sur scène en compagnie du pianiste Elchin Shirinov et de la batteuse Roni Kaspi. Avishai Cohen dont l’inspiration trouve sa source aux confins des musiques orientales, classique et pop, délaissa ses vocaux habituels pour se concentrer sur sa contrebasse qu’il maîtrise avec aisance. Particulièrement mis en valeur, Elchin Shirinov, natif d’Azerbaïdjan, développa un jeu expressionniste contrastant de façon heureuse avec la manière toute en nuances de la batteuse Roni Kaspi. Une belle première soirée.

Kenny Barron
Johnathan Blake
Steve Nelson
Avishai Cohen
Roni Kaspi
Elchin Shirinov

Samedi 10 juillet

Éric Legnini trio “Six Strings Under”
Éric Legnini (p), Rocky Gresset (g), Thomas Bramerie (b).

Melody Gardot & l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, dirigé par Yvan Cassar

Le samedi 10 juillet, le public remplit les gradins de la Pinède Gould pour la prestation du trio « Six Strings Under » d’Éric Legnini dont le statut de chef de file du jazz européen est maintenant fermement établi. Influencé par Herbie Hancock et Phineas Newborn, Éric Legnini a puisé aux meilleures sources du jazz, de la soul et de la musique brésilienne pour délivrer un message nourri d’un groove dansant porté par la contrebasse de son vieux complice Thomas Bramerie. Son répertoire favorise les belles mélodies, par exemple celle de Nuages magnifiquement dessinée par Rocky Gresset, un caïd du jazz manouche.

Vint ensuite Melody Gardot, la star de la soirée, accompagnée par son groupe, où officie l’excellent trompettiste Sylvain Gontard, et l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo dirigé par Yvan Cassar. Elle aussi rendit un hommage sensible à Jean-René Palacio. Sa prestation fut celle que l’on attendait d’elle avec des titres provenant de “Sunset in the Blue”, son dernier album réalisé en studio pendant le confinement. On entendit quelques standards, des ballades, des compositions originales, le tout délivré avec une voix suave aux accents séducteurs dont elle tire avec talent le meilleur parti. Une démonstration de variété jazzy de haut vol.

Éric Legnini
Éric Legnini, Rocky Gresset, Thomas Bramerie

Dimanche 11 juillet 

Kenny Garrett Quintet 
Kenny Garrett (as), Vernell Brown (p), Rudy Bird (perc), Eric Wheeler (b), Mark Whitfield Jr(dm).

Lincoln Center Jazz Orchestra with Wynton Marsalis
Wynton Marsalis, Ryan Kisor, Marcus Printup, Kenny Rampton (tp), Chris Crenshaw, Vincent Gardner, Elliot Mason (tb), Walter Blanding, Victor Goines, Sherman Irby, Ted Nash, Paul Nedzela (saxes), Carlos Henriquez (b), Dan Nimmer (p), Obed Calvaire (dm).

Changement de ton le lendemain avec le quintet de Kenny Garrett accompagné de superbes musiciens : Vernell Brown au piano, Eric Wheeler à la contrebasse, Rudy Bird aux percussions et Mark Whitfield, un batteur dont le jeu puissant et exubérant propulse tout l’orchestre. Compagnon de Miles Davis qui en disait le plus grand bien, Kenny Garrett connaît toutes les vertus du jazz. Sa prestation débuta sur les chapeaux de roue avec un morceau free générateur d’une énergie incandescente, suivi d’un morceau funky et d’une version de Body and soul interprétée sur le mode ballade avant de finir par un riff groovy qui, en trois notes, mit debout les spectateurs de la Pinède. 

Wynton Marsalis défend aussi la tradition du jazz mais avec d’autres moyens, ceux du Lincoln Center Jazz Orchestra et de ses musiciens chevronnés dont le savoir-faire n’est plus à démontrer. S’appuyant sur des orchestrations élaborées avec le plus grand soin, cette formation défend avec une science musicale accomplie un répertoire qui porte haut les couleurs d’un jazz exigeant. Le sommet de la soirée fut une lecture passionnante de Love supreme portée par des arrangements somptueux qui en ont révélé toute la beauté.  

Texte : Alain Tomas
Photos © Rivierakris

Kenny Garrett Quintet 
Lincoln Center Jazz Orchestra
Alain TomasfestivalJazz à Juan