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Hommages / 10.01.2022

James Mtume (1946-2022)

Originaire de Philadelphie, James Forman grandit entouré de musique : son père est le saxophoniste de jazz Jimmy Heath (dont les deux frères, Percy et Albert, sont également musiciens), et il est élevé par son beau-père, le pianiste James Forman Jr., un vétéran des orchestres de Dinah Washington et Dizzy Gillespie. S’il apprend le piano et les percussions, c’est le sport, et particulièrement la natation, qui occupe une bonne partie de sa jeunesse. Il s’implique également politiquement pendant la seconde partie des années 1960, au sein de l’US Organization, un groupe nationaliste afro-américain concurrent du Black Panther Party, où il adopte le nom de Mtume, qui signifie “messager” en swahili. 

C’est cependant vers la musique qu’il se tourne au début des années 1970. Il fait sa première apparition sur l’album “Kawaida” de son oncle Albert (sous le pseudonyme Toudie Heath-Kuumba) dont il compose la quasi-totalité du répertoire et sur lequel il est crédité aux congas, aux côtés de son père et d’un “all star” avec notamment Herbie Hancock et Don Cherry. S’il publie dès 1972 un premier album personnel, “Alkebu-Lan – Land Of The Blacks (Live At The East)” sous le nom du Mtume Umoja Ensemble, c’est comme accompagnateur qu’il se fait alors particulièrement remarquer, intégrant les ensembles de Miles Davis (l’album “On The Corner”)  et Sonny Rollins tout en accompagnant en studio Abbey Lincoln, Johnny Pate, Gato Barbieri, Pharoah Sanders, Lonnie Liston Smith, McCoy Tyner, Larry Coryell, Roberta Flack ou Ramsay Lewis. Il publie également un autre album personnel en 1977, “Rebirth Cycle”, avec notamment les voix de Dee Dee Bridgewater et Jean Carne.

Avec le guitariste Reggie Lucas, qu’il a rencontré au sein du groupe de Miles Davis, il monte à partir du milieu des années 1970 un partenariat artistique qui se traduit par un virage vers le R&B de l’époque – James Mtume présentait leur son comme du « sophistifunk » –, à la fois en lançant le groupe Mtume qui fait ses débuts discographiques en 1978 avec “Kiss This World Goodbye” et en travaillant comme auteurs-compositeurs et producteurs pour d’autres. Porté par la voix de Tawatha Agee, les enregistrements du groupe ne tardent pas à rencontrer un certain succès, qui culmine au début des années 1980 (après le départ de Lucas) avec le tube Juicy fruit et l’album du même nom.

L’aventure se poursuit jusqu’au milieu des années 1980 avec plusieurs succès supplémentaires. En parallèle, Mtume et Lucas travaillent avec Phyllis Hyman, Stephanie Mills et quelques autres artistes R&B (dont les O’Jays, les Spinners et le duo Roberta Flack-Donny Hathaway), et décrochent en 1980 le Grammy de la meilleure chanson R&B pour Never knew love like this before, chantée par Stephanie Mills, qui obtient également le grammy de la meilleure prestation R&B féminine. 

Si le partenariat avec Reggie Lucas arrive à son terme au début des années 1980, James Mtume reste tout aussi actif, produisant en particulier Roy Ayers, Levert et les Bar-Kays. Il passe sans difficulté le virage des années 1990, travaillant en particulier avec Mary J. Blige, K-Ci & JoJo et Maysa, alors que ses classiques de la décennie précédente – et en particulier Juicy fruit – font les délices des samplers. Plus discret dans les années 2000 – même s’il coproduit le Soul sista de Bilal –, il anime une émission de radio très populaire à New York sur les ondes de KISS 98.7 FM et participe régulièrement à des événements et conférences. Il donne même en 2019 un TED Talk, Our Common Ground in Music, disponible en vidéo.

Texte : Frédéric Adrian
Photos © DR

Frédéric AdrianJames Mtume