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Brèves / 22.07.2014

James Govan (1949-2014)

La page Facebook du Rum Boogie Café, le club de Memphis où il avait ses habitudes, nous apprend le décès en date du 18 juillet 2014 du chanteur James Govan. Malgré une discographie famélique, il était considéré par un public aussi restreint que fervent d’admirateurs comme l’un des successeurs les plus convaincants d’Otis Redding.

Né le 2 septembre 1949 à McComb, dans le Mississippi, c’est à Memphis qu’il grandit et qu’il commence à pratiquer la musique, apprenant notamment la guitare et la batterie. C’est alors qu’il se produit avec un groupe baptisé The Vans qu’il est repéré par l’auteur-compositeur George Jackson, qui le met en contact avec le label Fame. Paru en 1969, son premier 45-tours propose en face A Wanted: lover (No experience necessary), un titre gravé précédemment par Laura Lee, et une reprise du Jambalaya (orthographié “Jambolyia” sur le label !) de Hank Williams en face B. Malgré la qualité de l’accompagnement et une prestation vocale à couper le souffle, le disque passe inaperçu. Un second single sort sur Fame quelques mois plus tard, avec une reprise des Beatles en face A, Something, et une composition cosignée par George Jackson, You got a lot to like, en face B. Malgré les efforts promotionnels de Fame, qui finance une pleine page de publicité dans Billboard, le succès n’est à nouveau pas au rendez-vous. Des séances supplémentaires en 1972 chez Fame et au studio Bloc-6 de Memphis (avec le producteur Biller Herbert) n’aboutissent pas. Le disque suivant de Govan paraît à la fin de 1973. Publié sur le petit label de Memphis Fretone, il s’agit d’une “novelty” de Noël baptisée Frumpy qui paraît dans le même temps sur le même label (avec Little round man en face B) dans une version country par Jim Cannon. Là aussi, une pleine page de publicité dans Billboard ne suffit pas à attirer le succès.

 


James Govan et Mickey Buckins, studios FAME © Fame Records

 

En dehors d’une apparition ponctuelle, en tant que batteur, sur l’album “Eyes” de Tony Joe White en 1976, il faut attendre 1982 pour que Govan retrouve le chemin des studios, à l’occasion de séances produites par David Johnson à Broadway Sound à Sheffield avec certains des musiciens de Muscle Shoals. Seul un 45-tours (Uphill climb b/w Jealous Kind) est publié initialement sur le micro label Envelope Records de Los Angeles, et c’est seulement  en 1987 que le label britannique Charly publie l’album enregistré à cette occasion sous le titre “I’m In Need”. Cette nouvelle parution permet aux amateurs européens de découvrir Govan, et celui-ci apparaît à plusieurs reprises au cours des années 1990 au festival soul de Porretta, dont il devient un des artistes fétiches.

 


Porretta 1996 © Alain Jacquet

 


Ann Peebles et James Govan, Porretta 1996 © Jean-Yves Mougin

 

Parallèlement il commence, à partir de la fin des années 1980, à se produire régulièrement dans les clubs de Beale Street à Memphis, puis prend ses habitudes au Rum Boogie Café. Accompagné de son Boogie Blues Band, il y reprend soir après soir pour un public largement touristique les classiques de la soul. Un disque autoproduit, “A Night On Beale”, paru en 1999, témoigne de son show de l’époque. Une interview réalisée par Pierre Daguerre est publiée à l’été 1997 dans le numéro 147 de Soul Bag.

Malgré les appels pressants de ses admirateurs européens, Govan semble se contenter de ses prestations sur Beale Street. Après une dernière venue en 1997, il refuse les invitations du festival de Porretta, et même la réédition, en 1998, de son album de 1987, ne suffit pas à le convaincre de tenter de relancer sa carrière. Il faut attendre 2013 et la publication par Kent de l’ensemble de ses enregistrements gravés entre 1969 et 1972 pour Fame et restés largement inédits (4 étoiles dans Soul Bag 212) pour que sa notoriété dépasse le stade de quelques initiés. Même la radio publique américaine lui consacre un reportage, sous le titre “The Soul Singer Who Never Quite Made It”. Un disque de reprises enregistrées lors de ses passages à Porretta est sorti il y a quelques mois à l’initiative du directeur du festival Graziano Uliani. À défaut d’apporter grand-chose à l’œuvre de James Govan, il constitue un hommage mérité à une figure mystérieuse de la soul de Memphis.

Frédéric Adrian

 


Michael Toles et James Govan, Porretta 1996 © DR / Soul Bag Archives