;
Hommages / 09.05.2025

Ils nous quittent : Ann Sexton, Angelia Taylor, Andy Bey, Lenny Welch, Tommie Harris, Paul Batiste, Abraham Yameogo…

Hommages aux artistes et personnalités disparus récemment.

Ann Sexton (1950-2025)

Originaire de Greenville, en Caroline du Sud, Ann Sexton, qui est la cousine de Chuck Jackson, commence sa carrière de chanteuse à l’église. Elle fait ses débuts discographiques à la fin des années 1960 sur un single du groupe local Elijah & The Ebonies, dont elle épouse le saxophoniste, Melvin Burton. Ensemble, ils montent un ensemble, Ann Sexton And The Masters Of Soul, qui publie un 45-tours sur le petit label Impel, repris en licence par Seventy Seven Records, la maison de disques du disc-jockey très influent John Richbourg. C’est pour lui qu’elle enregistre une série de 45-tours dont elle est souvent la coautrice avec son mari pendant la première moitié des années 1970, décrochant même un petit succès R&B en 1973 avec You’re losing me. Un album sort la même année, “Loving You, Loving Me”. Deux autres singles paraissent en 1976, dont I’m his wife (You’re just a friend), et un album en 1977, “The Beginning”, mais la carrière discographique de Sexton prend fin peu après, et c’est dans les écoles de New York qu’elle poursuit sa carrière.

En 2003, l’utilisation de You’re losing me dans le film 21 Grams suscite un nouvel intérêt dans sa musique, et le label Soul Brother Records lui consacre une copieuse “Anthology”. Le disc-jockey allemand Dan Dombrowe, en plus de l’aider à récupérer ses droits d’auteur, la persuade de remonter sur scène, et elle est en 2007 à l’affiche du Baltic Soul Weekender, où elle fera son retour à de multiples occasions. Elle apparaît ensuite dans d’autres festivals du même type dans toute l’Europe – mais pas en France, hélas –, et réenregistre même You’re losing me en 2009 avec le Baltic Soul Orchestra. 

Photo © DR / Collection Gilles Pétard

Angelia Taylor (1966-2025)

Originaire de Como dans le Mississippi, Angelia Taylor y chante régulièrement à l’église, et c’est là qu’elle est enregistrée, avec quelques amies, pour l’anthologie Daptone “Como Now: The Voices Of Panola Co., Mississippi”. Baptisé les Como Mamas, le trio qu’elle forme avec Della Daniels et Ester Mae Wilbourn est la révélation de l’album, ce qui lance une improbable carrière pour Daptone qui les voit publier deux albums, tourner dans le monde entier (y compris en France, à plusieurs reprises), apparaître sur un disque de Luther Dickinson et même se produire à l’Apollo.

Angelia Taylor © Frédéric Ragot

Andy Bey (1939-2025)

Malgré quelques soutiens de taille – de John Coltrane, dont il était un des chanteurs préférés, à l’électronicien The Avener, qui remixé en 2014 son classique Celestial blues –, la musique d’Andy Bey n’a jamais eu la popularité qu’elle méritait auprès du grand public, et sa carrière pleine d’à-coups n’a sans doute pas aidé à le faire connaître.

Originaire de Newark dans le New Jersey, le chanteur et pianiste monte à la fin de son adolescence un trio avec ses sœurs  Salome et Geraldine, Andy and the Bey Sisters, qui tourne largement (notamment en Europe et particulièrement en France) et publie trois albums dans la première moitié des années 1960, avant de se séparer en 1967. Il poursuit sa carrière en apparaissant sur les disques de ses collègues comme Max Roach, Stanley Clarke, Archie Shepp et Duke Pearson et engage deux collaborations au long cours avec Gary Bartz et Horace Silver. Il publie en 1974 un premier album personnel sur Atlantic, “Experience And Judgment”, mais l’expérience est sans suite, et il se fait plus discret pendant la suite de la décennie et les années 1980, se contentant d’apparaître ponctuellement sur disque et sur scène, en particulier avec Horace Silver.

Les années 1990 le voit faire son retour, avec un nouveau disque de standards sous son nom, “As Time Goes By”, et quelques nouvelles collaborations. C’est cependant son disque de 1996, “Ballads, Blues & Bey”, qui relance réellement sa carrière. Plusieurs albums sous son nom paraissent jusqu’au milieu des années 2010, dont “American Song” en 2005 qui lui vaut une nomination aux Grammys. En 1996, il révèle publiquement son homosexualité et le fait qu’il soit atteint du VIH, une démarche peu évidente dans un milieu du jazz au machisme confirmé – comme il le déclare avec humour, « Noir, gay et séropositif, ça fait beaucoup ! J’ai toujours vécu toutes sortes de phobies, c’est sûr ! » Il se produit régulièrement, en particulier à New York, jusqu’à la fin des années 2010.

Lenny Welch (1938-2025)

Originaire d’Asbury Park, dans le New Jersey, Lenny Welch fait ses débuts discographiques à la fin des années 1950 chez Decca puis Cadence dans un registre à mi-chemin entre grande variété et R&B. il décroche un premier succès avec sa version du classique country You don’t know me en 1960 – deux ans avant que Ray Charles n’en fasse un titre majeur de l’album “Modern Sounds In Country And Western Music”.

C’est sa version de Since I fell for you de Buddy et Ella Johnson qui lui donne le plus gros tube de sa carrière en 1963, mais il se classe régulièrement dans le Hit 100 jusqu’au début des années 1970 en particulier avec ses reprises de Ebb tide et Breaking up is hard to do. S’il enregistre régulièrement jusqu’au milieu des années 1980, il travaille également en tant que chanteur de jingles publicitaires. Ses compositions ont été enregistrées par différents artistes dont Otis Clay et Facts of Life. Il se produit régulièrement sur le circuit de la nostalgie jusqu’aux années 2000. Ace lui consacre une anthologie en 2007, “A Taste Of Honey: The Complete Cadence Recordings 1959-1964”. 

Tommie Harris (1938-2025)

Originaire d’Alabama, le batteur et chanteur Tommie Harris ne tarde pas se lancer dans une carrière musicale qui le voit intégrer l’orchestre du saxophoniste Yusef Lateef et croiser la route de nombreux bluesmen. À la fin des années 1950, il se lance dans une carrière militaire, qui se termine quelques années plus tard en Allemagne. Il décide d’y rester ensuite et relance sa carrière musicale avec différents groupes qui se produisent en particulier sur les bases militaires. C’est dans ce cadre qu’il rencontre un autre ancien soldat, Johnnie Wilder, avec qui il monte la première version du groupe Heatwave, qu’il quitte cependant avant que celui-ci ne commence sa carrière discographique. Il se produit ensuite régulièrement sur disque et sur scène avec des musiciens américains en tournée ou installés en Europe : Luther Allison, Mickey Baker, Vivian Reed, The Johnny Thompson Singers, Bug Jay McNeely…

Il rejoint dans les années 1990 le First Class Blues Band, aux côtés notamment du pianiste Christian Rannenberg, et publie à la fin de la décennie un premier album personnel sous le nom de Tommie Harris & Seventh Son, “Nothin’ But The Blues”. Tout en se produisant régulièrement dans les clubs berlinois, il continue à apparaître, en tant que chanteur et/ou batteur, sur les disques des autres, enregistrant avec différents musiciens allemands – Gregor Hilden, Tommy Schneller, Kai Strauss… – ainsi qu’avec Aron Burton. Il a publié un dernier album en 2018, “Alabama Hambone”, et s’était produit à plusieurs reprises en France ces dernières années.

Paul Batiste (1949-2025)

Originaire de La Nouvelle-Orléans et membre d’une famille à la riche histoire musicale, le guitariste Paul Batiste intègre vite David Batiste & The Gladiators, le groupe emmené par son frère, apparaissant en particulier sur le classique Funky soul, paru en 1970, et assurant le management du groupe à partir de l’année suivante.

Il fonde et dirige ensuite le Batiste Brothers Band, dont il est le principal auteur du répertoire et qui fait ses débuts discographiques en 1976 avec un single, Starlite. Sous sa direction, l’ensemble familial enregistre régulièrement pour le label familial Dynasty jusqu’au milieu des années 1980, dont un album, “Freeze”, paru en 1982.

Tout en menant sa carrière musicale, il enseigne pendant 35 ans, à partir de 1978, dans les écoles de la ville. S’il n’enregistre que ponctuellement par la suite (deux albums dans les années 1990), le groupe continue, dans différentes configurations, à se produire sur les scènes de La Nouvelle-Orléans, et notamment au Jazz Fest. En 2024, il s’y produit avec plusieurs générations de Batiste pour rendre hommage à son frère Russell récemment décédé. Hors du groupe familial, il enregistre avec Linda Lewis, Doug Carne, Jon Cleary et Kidd Jordan. Sous son propre nom, Paul Batiste a publié un disque gospel, “Psalm 23”, en 2019, ainsi qu’un livre de mémoires, (Gon’ Be Dat) New Orleans Music

Abraham Yameogo (1962-2025)

Né en 1962 au Burkina Faso, Abraham Yameogo rejoint la France à 2 ans pour se faire soigner de la poliomyélite, dont il restera paralysé des deux jambes. Après un bref retour au Burkina Faso, il revient en France, à Nancy, pour des études de droit, mais la musique (il chante et joue de la guitare) prend vite le pas.

Il forme un premier groupe appelé Zig Zag, puis, au début des années 1980, c’est le groupe Kilimandjaro, qu’il monte avec le bassiste Jean-Luc Déta, avec notamment Denis Palatin à la batterie (qui deviendra un pilier de la scène blues française et un accompagnateur réputé) et Thierry Lopez à la deuxième guitare (on le retrouvera plus tard avec Nico Backton). Le groupe publie deux disques, “Soul Blues Band” (Inak) en 1993 et “I On Blues” (EMD) en 1998, dûment et élogieusement chroniqués dans Soul Bag. Abraham apparaîtra aussi sur la scène de la Bagneux Blues Night en 1995.

Par la suite, Kilimandjaro tournera beaucoup, passera sur plusieurs chaînes de télévision, régionales et nationales, puis Abraham retournera au Burkina Faso. À partir de là, sa trace musicale se perd un peu. Denis Palatin nous dit qu’Abraham partagea sa vie entre le Brésil et Paris. Il est décédé en ce début mai.

Randy Brown (1952-2025)

Originaire de Memphis, Randy Brown, dont le frère William est membre des Mad Lads, un des groupes phares de Stax, se fait remarquer à la fin des années 1960 avec un autre ensemble qui enregistre pour le label, les Newcomers, qui décrochent un petit succès en 1971 avec Pin the tail on the donkey, et qu’il quitte en 1973. Il se lance en solo avec deux singles crédités à Randolph Brown & Co qui sortent sur Truth Records, une sous-marque de Stax en 1974 puis deux autres l’année suivante sur IX Chains Records, sans grand succès.

Il doit patienter trois ans avant que sa carrière décolle vraiment sous les auspices de deux autres vétérans Stax, Carl Hampton et Homer Banks, avec quatre albums et une série de singles en 1978-1981 pour Parachute Records, une filiale de Casablanca dirigée par Russ Regan, puis Chocolate City, un autre sous-label de Casablanca. Sur cette période, deux de ses 45-tours se classent dans les premières places du hit-parade R&B de Billboard, I wanna make love to you et We ought to be doin’ it, tandis qu’un Stax resuscité publie sous son nom un album constitué d’enregistrements plus anciens. Malgré quelques singles ponctuels dans la suite de la décennie, le succès ne se poursuit pas et il se retire progressivement de l’industrie musicale, avant d’être persuadé par ses admirateurs britanniques de faire son retour sur scène, à l’occasion d’évènements rare groove. Il s’était encore produit en Angleterre fin 2024.

Harry Elston (1938-2025)

Originaire de San Diego, c’est à Los Angeles que Harry Elston commence sa carrière musicale quand il monte avec son ami d’enfance Floyd Butler un groupe vocal baptisé les Hi-Fi’s, qui comprend également Marilyn McCoo et Lamont McLemore. Repéré par Ray Charles, l’ensemble assure régulièrement les premières parties de ses concerts, mais se sépare vers 1968. Pendant que McCoo et McLemore vont monter The Fifth Dimension, Butler et Elston lancent leur propre groupe, The Friends of Distinction.

Repérés par l’ancien footballer reconverti en acteur Jim Brown, ils signent un contrat avec RCA et décrochent un tube avec leur premier single, une version chantée de Grazing in the grass dont le texte est signé Elston qui en est également la voix principale. Si d’autres titres sont couronnés de succès dans les années suivantes, la réussite est moindre, et le groupe se sépare au milieu des années 1970, avant que Elston ne le relance dans le courant des années 1990, sans autre membre original, sur le circuit de la nostalgie.

William “Deadeye” Norris (1951-2025)

Figure obscure de la scène blues de Chicago des années 1970, le chanteur et guitariste William “Deadeye” Norris joue avec Little Mack Simmons, McKinley Mitchell et Bobby Rush et participe en 1977 à la tournée européenne de la New Generation of Chicago Blues mise sur pied par Jim O’Neal et Amy Van Singel qui présente, sous la houlette de Willie Dixon, Harmonica Hinds, Billy Branch, Johnny B. Moore, Lurrie Bell et quelques autres.

Si ses prestations dans ce cadre attirent des échos positifs – le magazine Jefferson, dans un écho du concert berlinois, considère qu’il a « conquis le cœur du public et volé le show » –, la reconnaissance publique lui échappe et il intègre au milieu des années 1980 l’orchestre de Johnnie Christian. À la fin des années 1980, il se rebaptise Sonny Mack et monte un groupe avec Rico McFarland, The Mack II Band. Au cours des années, plusieurs séjours en prison viennent interrompre sa carrière.

Au début des années 1990, il s’installe à Memphis et ne tarde pas à se faire remarquer sur la scène locale. Il publie deux albums pour Ecko dans les années 2010, “Get On Up!” et “Going For Gold” avec des chansons dans un registre cher à la scène sudiste de l’époque comme Somebody’s been fishin’ in my private fishin’ hole ou I only get laid when I get paid et écrit des chansons pour différents collègues de label comme Lee Shot Williams et O.B. Buchana tout en se produisant régulièrement au King’s Palace Cafe de Beale Street. Le magazine Jefferson lui consacre un portrait au mois d’octobre 2012.

Pat Hodges (1947-2025)

Originaire de Los Angeles, la chanteuse Pat Hodges publie quelques singles pour des labels locaux dans la deuxième partie des années 1960, mais c’est quand elle est sélectionnée par Mickey Stevenson au début de la décennie suivante pour faire partie d’un groupe vocal censé concurrencer les Supremes que sa carrière débute réellement. Sous le nom de Hodges, James & Smith, avec Denita James et Jessica Smith, elle enregistre une série de singles et d’albums, en particulier pour 20th Century Records et London Records tout au long des années 1970, décrochant un petit succès en 1977 avec Since I fell for you. Seule ou avec ses deux collègues, elle assure également le rôle de choriste aux côtés de Ronnie McNeir, Bill Withers, Bobby Womack, Sylvester, Billy Preston, Lamont Dozier, Tina Turner…

Si Hodges, James & Smith n’enregistrent plus après les années 1970, le trio continue à se produire ponctuellement et à travailler comme choristes, tandis qu’Hodges se lance dans une carrière solo qui la voit graver plusieurs singles dans le courant des années 1990 et 2000, dans un registre soul ou electro, tout en continuant à assurer le rôle de choriste, apparaissant en particulier sur plusieurs albums de Kenny Wayne Shepherd. 

George Freeman (1927-2025)

Né à Chicago dans une famille musicale – ses frères sont le saxophoniste Von Freeman et le batteur Bruz Freeman et ses parents étaient musiciens amateurs –, le guitariste George Freeman ne tarde pas à se faire remarquer sur la scène locale en tant que leader de ce qui est considéré comme le premier ensemble be-bop de la ville et en accompagnant les vedettes de passage comme Coleman Hawkins et Lester Young. Il rejoint ensuite l’orchestre de Joe Morris avec qui il fait ses débuts discographiques fin 1947.

De retour à Chicago, il se produit localement tout au long des années 1950, accompagnant à plusieurs reprises Charlie Parker, avant de reprendre la route des tournées aux côtés de Sil Austin, Jackie Wilson et Wild Bill Davis à la fin de la décennie. Il intègre ensuite le groupe de Richard “Groove” Holmes qu’il accompagne sur disque et sur scène pendant toutes les années 1960, avant de rejoindre l’ensemble de Gene Ammons et celui de Jimmy McGriff, tout en lançant sa carrière personnelle au début des années 1970 avec une série d’albums dans un registre soul jazz.

Discret pendant les années 1980, il relance sa carrière personnelle la décennie suivante, enregistrant une série d’albums dont le dernier, “The Good Life”, est sorti en 2023. Billy Branch apparaît en 2019 sur son album “George The Bomb!”. Il continue à se produire régulièrement dans les clubs et festivals, notamment à Chicago et dans les environs, et c’est sur la scène du Green Mill qu’il avait fêté en 2024 ses 97 ans. 

Terry Manning (1947-2025)

Originaire d’Oklahoma City, c’est au Texas, à El Paso, que Terry Manning fait ses débuts musicaux, croisant notamment la route de Bobby Fuller, mais c’est après s’être installé à Memphis que débute réellement sa carrière en tant qu’ingénieur du son dans les studios Stax puis Ardent, où il participe à des séances pour Albert King, William Bell, Isaac Hayes et bien d’autres. Il fait d’ailleurs partie des techniciens qui participent à l’enregistrement de Wattstax. Sa réputation ne tarde pas à dépasser Memphis, et il est sollicité par Jimmy Page pour mixer le troisième album de Led Zeppelin.

Tout en continuant à travailler comme ingénieur du son – les Staple Singers, Tony Joe White, Luther Ingram, ZZ Top et bien d’autres font appel à ses services – il publie en 1970 son propre album, “Home Sweet Home” et se lance dans une carrière de producteur qui le voit collaborer aussi bien avec Furry Lewis ou les Fabulous Thunderbirds qu’avec les rockers de Molly Hatchet, Joe Cocker ou George Thorogood. De façon moins exposée, il produit également des albums de Byther Smith et Eddie Hinton.

Proche de William Eggleston, il mène en parallèle une carrière de photographe, et ses clichés – dont des images de Martin Luther King arrivant à Memphis la veille de son assassinat – ont été exposés à plusieurs reprises. Il relance sa carrière personnelle dans les années 2010, se produisant régulièrement à Memphis et produisant plusieurs albums, dont le dernier, “Red And Black”, est sorti début 2025.

Larry Scott Dixon (1947-2025)

Originaire d’Atlanta, le chanteur et harmoniciste Larry Scott Dixon, qui se fait appeler le “blues physician” (le “médecin blues“) et se présente parfois sous le titre de Dr. Dixon, Bh.d, l’abréviation finale signifiant “blues harmonica doctor”,  se fait remarquer à partir des années 1960 sur la scène blues locale, jouant aussi bien avec les musiciens de la ville qu’avec les vedettes de passage. Après avoir commencé à se produire professionnellement avec le groupe Dry Ice, il monte son propre ensemble, Dr. Dixon and The Operators, au sein duquel passe notamment le guitariste Luther “Houserocker” Johnson, avec lequel il se produit dans tous les clubs de la ville.

Dans le courant des années 1980, il se lance dans une carrière d’enseignant spécialisé pour les enfants en situation de handicap, ce qui le conduit à s’installer en Caroline du Sud. De retour à Atlanta au début des années 2000, il retrouve sa place sur la scène locale, entre clubs et festivals. Dessinateur et peintre également, il est l’auteur du portrait de Muddy Waters qui apparaît derrière celui-ci et sa famille dans la photo de la pochette intérieure de l’album “King Bee”. Il ne semble pas avoir enregistré. 

Freeman Vines (1942-2025)

Né dans une famille musicale – celle des Glorifying Vines Sisters et, à la génération suivante, des Dedicated Men of Zion, en particulier –, ce n’est pas en tant que musicien lui-même que Freeman Vines se fait remarquer, mais en tant que luthier. Découvert par Tim Duffy de la fondation Music Maker, son travail de plasticien, influencé par les images de lynchages vues dans sa jeunesse, fait l’objet d’un livre de photos, Hanging Tree Guitars, en 2020, mais aussi de différentes expositions et de différents courts métrages documentaires. Une exposition virtuelle est visible en ligne à cette adresse : exhibit.hangingtreeguitars.com

David Johansen (1950-2025)

Figure majeure de la scène rock des années 1970, pionnier du punk avec les New York Dolls, le chanteur David Johansen n’avait jamais caché son goût pour le blues, la soul et le R&B. Dès leurs débuts, les Dolls incluent des titres de Sonny Boy Williamson et de Sam Cooke dans leur répertoire. Après la dissolution du groupe et une première carrière solo, il se lance dans un nouveau projet sous le nom de Buster Poindexter, reprenant également de nombreux classiques blues et R&B, puis crée un nouveau groupe, David Johansen And The Harry Smiths, dont le répertoire entre blues et country s’inspire largement de l’“Anthology Of American Folk Music” compilée par celui-ci, avec des emprunts à Lightnin’ Hopkins, Muddy Waters ou Mississippi John Hurt. Il avait enregistré avec Hubert Sumlin et participé au concert hommage organisé à l’Apollo après son décès. 

Hubert Tubbs (1947-2024)

Hubert Tubbs se fait remarquer au milieu des années 1970 quand il remplace Lenny Williams au poste de chanteur de Tower Of Power. Si son séjour dans le groupe est bref – le temps d’un album studio, “In The Slot”, et d’un disque en public, “Live And In Living Color” –, il continue à collaborer avec jusqu’à la fin de la décennie, cosignant en particulier You ought to be havin’ fun, le dernier titre de l’ensemble à se classer dans le Hot 100. Plus discret par la suite, même si une de ses chansons apparaît sur la bande originale du film de Blake Edwards Blind Date en 1987, il s’installe dans les années 1990 en Autriche où il travaille sur disque et sur scène avec différents musiciens et groupes locaux et européens comme Jestofunk, The Freedom Warriors, The Horny Funk Brothers ou le duo français électro Panzer Flower, avec qui il décroche en 2014 le tube We are beautiful. Il s’est produit régulièrement au moins jusqu’en 2022.

Bunky Green (1933-2025)

Originaire de Milwaukee dans le Wisconsin, le saxophoniste Vernice Green Jr se fait remarquer quand il intègre le groupe de Charles Mingus dans les années 1950. Installé à Chicago, il publie plusieurs albums sur les sous-labels de Chess Cadet et Argo, et participe à des séances de studio pour plusieurs des artistes du label, dont Billy Stewart (Summertime) et Sugar Pie DeSanto. Il mène par la suite une carrière intermittente, avec notamment plusieurs albums pour Vanguard dans les années 1970, se consacrant essentiellement à une mission de pédagogue, notamment à la Chicago State University et à la University of North Florida de Jacksonville. Il relance sa carrière à sa retraite académique, publiant plusieurs albums dans les années 2000.

Gino Matteo (19??-2025)

Originaire de Californie, le guitariste et chanteur Gino Matteo se fait remarquer au milieu des années 2000 et publie un premier album, “I’ve Been Thinkin’”, en 2007, suivi d’un second disque personnel, “Sweet Revival”, coproduit avec Joey Delgado des Delgado Brothers, en 2013. Guitariste régulier, sur scène comme sur disque (l’album “Dangerous”) de Sugaray Rayford, il l’accompagne partout en tournée, et notamment à plusieurs reprises en France, où il tourne également sous son nom, passant en particulier par Cognac en 2019. Il se produit ensuite régulièrement avec son épouse, la chanteuse Jane Bennett, sous le nom du Bennett Matteo Band, qui publie en 2022 l’album “Shake The Roots”, coproduit avec Kid Andersen. Il travaillait ces derniers temps avec Marquise Knox. 

Danny Cox (1942 ou 1943-2025)

Originaire de Cincinnati, le chanteur et guitariste Danny Cox se lance au début des années 1960 dans une carrière d’artiste folk, publiant un premier album dans ce registre, “At The Seven Cities”, dès 1963. Au fil des années, il se tourne plus vers le blues et la soul, publiant plusieurs disques dans le courant des années 1970 pour ABC et Casablanca. Plus discret par la suite, il poursuit sa carrière à Kansas City, où il s’est installé dans les années 1960, et publie plusieurs disques dans les années 2000 et 2010. 

Beau Dozier (1979-2025)

Fils du producteur Motown Lamont Dozier, Beau Dozier fait des débuts précoces dans l’industrie musicale puisque tant Ben E. King que son père enregistrent I cry for you, une chanson qu’il a écrite à l’âge de 7 ans. À partir de la fin des années 1990, il travaille comme auteur et producteur pour différents artistes dont Fantasia, Boyz II Men, Joss Stone…

Stedman Pearson (1964-2025)

Originaire de Grande-Bretagne, Stedman Pearson se fait remarquer avec le groupe Five Stars composé de ses frères et sœurs sous la direction de leur père, avec une série d’albums et de singles qui connaissent un succès international tout au long des années, avec plusieurs titres qui se classent dans le hit-parade R&B de Billboard, dont Let me be the one qui monte jusqu’à la deuxième place. Si le succès du groupe s’atténue dès les années 1990, il continue à se produire avec l’ensemble – dans une version dont il est un des deux seuls membres originaux – au moins jusqu’à la fin des années 2000.

Fred Jenkins (19??-2025)

Bien qu’il soit particulièrement associé à la carrière du Gap Band – c’est sa guitare qui se fait entendre sur les tubes Burn rubber, You dropped a bomb on me et Party train, ainsi que sur les principaux albums du groupe du milieu des années 1970 à la fin des années 1980 ainsi que sur le dernier, “Y2K”, paru en 1999 –, la carrière de Fred Jernkins ne s’y résume pas. Aussi à l’aise dans le gospel que dans le funk et la soul (il a enregistré avec James Cleveland et le révérend Milton Brunson), il collabore également régulièrement avec Rick James et ses protégés, prêtant sa guitare à l’album “The Flag” de celui-ci et produisant la chanteuse Val Young. Au fil des années, il travaille aussi avec Tyrone Davis, Janet Jackson, Eloise Laws, Boyz II Men, Brandy & Monica (il cosigne The boy is mine), Keith Sweat…

Clarence “Chet” Willis (19??-2025)

Originaire de Dayton dans l’Ohio, le guitariste et bassiste Clarence Willis se fait remarquer rapidement sur la scène locale, au sein notamment d’un groupe gospel, les Gospelteers. Au milieu des années 1970, il rejoint les Ohio Players, à temps pour participer aux plus grands succès du groupe (Funky worm, Rollercoaster, Honey, Skin tight, Fire…). Membre actif de l’ensemble jusqu’à sa retraite il y a quelques mois, il monte en parallèle son propre ensemble, Shadow, avec deux autres membres des Players, avec lequel il publie trois albums sur Elektra à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Il apparaît également sur des projets annexes des Ohio Players, comme les albums de Kitty And The Haywoods et Faze-O, ainsi que sur l’album “Rockin’ You Eternally” de Leon Ware.

Terry Thompson (19??-2025)

Originaire de Chicago, cousin de Marshall Thompson, Terry Thompson s’illustre sur la scène musicale locale dès le milieu des années 1960 à la fois comme batteur de studio – notamment pour Vee Jay et Chess – et comme arrangeur, en particulier pour le groupe de son cousin.

Huey Williams (1938-2025)

Dernier survivant de la version originale des Jackson Southernaires au sein desquels il côtoyait son frère Frank, Huey Williams a participé à toute la carrière du groupe entamée dans les années 1960 sur Song Bird et qui s’est poursuivie ensuite sur Malaco, où l’ensemble a été la première signature gospel, puis sur Blackberry, où il a publié un dernier album en 2010. Le groupe a également animé pendant deux décennies son propre show radio, ainsi que, plus ponctuellement, une émission de télévision, Gospel Unlimited

Steve Baxter (19??-2025)

Originaire de Houston, c’est dans les studios de Los Angeles que le tromboniste Steve Baxter fait ses débuts aux début des années 1990, accompagnant en particulier sur disque, au fil des années, Johnny “Guitar” Watson, Chaka Khan, Sheila E, Macy Gray… Il intègre également le groupe de l’ancien guitariste d’Earth, Wind & Fire Al McKay et une version des Crusaders.

Glen Nightingale (19??-2025)

Originaire de Grande-Bretagne, le guitariste Glen Nightingale fait ses débuts en tant que directeur musical, sur scène et sur disque, de sa sœur Maxine Nightingale, avant de s’installer aux États-Unis au milieu des années 1970, où il commence une collaboration au long cours – une dizaine d’albums, en plus des différentes tournées – avec le Gap Band et les autres labels du label Total Experience (Penny Ford, Yarbrough & Peoples…). De retour en Angleterre dans les années 1980, il commence à travailler avec le chanteur Junior, puis avec Boy George et Joe Cocker, avant de collaborer dans la décennie suivante avec James Brown, Soul II Soul, Jamiroquai, Angélique Kidjo, Mica Paris ou Omar, tout en continuant à travailler pour différents artistes sur scène et en studio. 

Herb Greene (1942-2025)

Originaire de Californie, le photographe Herb Greene documente dès les années 1960, pour Rolling Stone en particulier, la scène musicale de San Francisco, réalisant en particulier l’image de couverture de l’album « Surrealistic Pillow » de Jefferson Airplane. Au fil des années, il contribue aux pochettes de disques de Canned Heat, The Pointer Sisters, Sly Stone, Larry Graham, Herbie Hancock, Wah Wah Watson et bien d’autres.

Luther “Badman” Keith (19??-2025)

Figure de la vie de Détroit en tant que journaliste au Detroit News où il fait ses débuts à la fin des années 1960 et activiste, Luther Keith s’était lancé dans les années 1990 dans une carrière de chanteur et guitariste sous l’influence de Luther Allison, publiant une série d’albums sous le nom de Luther « Badman » Keith (dont « Working Bluesman » en 2020) et se produisant régulièrement dans les clubs de la ville. 

Amadou Bagayoko (1954-2025)

Principalement connu pour le duo qu’il formait depuis les années 1970 avec son épouse, la chanteuse Mariam Doumbia, le chanteur et guitariste Amadou Bagayoko commence sa carrière musicale professionnelle dans le courant des années 1980 – il est lauréat d’un concours organisé par RFI en 1982 -et décroche le succès en France puis dans le monde entier à partir de la fin des années 1990, apparaissant dans de nombreux festivals. Doté d’un son de guitare immédiatement reconnaissable, il collabore avec de nombreux artistes, venus notamment de la pop et du rock, à partir des années 2000, sans jamais sacrifier sa singularité.

Jean-Claude Montredon (1949-2025)

Originaire de Martinique, le batteur et percussionniste Jean-Claude Montredon accompagne sur disques et sur scène aussi bien les musiciens antillais que les jazzmen, travaillant notamment avec Marius Cultier, Alain Jean-Marie, Bobby Few, Roland Brival, Chris McGregor, Malavoi, Archie Shepp… Il avait publié en 2016 son unique album personnel, “Diamant H20”.

Drew Zingg (1967-2025)

Originaire de New York, le guitariste Drew Zingg se fait remarquer au début des années 1990 avec la New York Rock and Soul Revue de Donald Fagen avant d’intégrer le groupe de scène de Steely Dan puis celui de Bizz Scaggs. Il tourne et enregistre également avec Marcus Miller, Gladys Knight, David Sanborn et Patti Austin.

J.T. Carter (1940 ou 1941–2025)

Membre fondateur des Crests, au sein desquels il assurait la voix de basse, J.T. Carter en était le dernier survivant et, en dehors d’un single solo pour Decca au milieu des années 1960 et d’un an passé au sein de la version des Drifters emmenée par Charlie Thomas, c’est au groupe qu’il a consacré sa carrière, apparaissant sur ses principaux tubes (dont le classique 16 candles en 1958) et le gardant en vie sur le circuit de la nostalgie même après le départ du chanteur principal original Johnny Maestro et jusqu’à la fin des années 2010.

Eddie Fluellen (19??-2025)

Originaire d’Akron dans l’Ohio, le tromboniste et clavier Eddie Fluellen fait partie des membres fondateurs du groupe Switch et apparaît sur leurs cinq albums parus chez Motown puis Total Experience. Il travaille également en parallèle avec Jermaine et Janet Jackson. À la séparation du groupe, il continue à écrire et enregistrer pour d’autres artistes dont Gladys Knight et Meli’sa Morgan et devient le directeur musical du Stone City Band formé par les anciens musiciens de Rick James. Il continuait à se produire sur le circuit de la nostalgie avec ce groupe ainsi qu’avec une version reformée de Switch.

Chris Youlden (1943-2025)

Figure de la scène blues rock britannique, Chris Youlden a, en plus de sa carrière personnelle, été le chanteur du groupe Savoy Brown à la fin des années 1960. Ses chansons ont été enregistrées par Rare Earth, Little Milton, Sherman Robertson, Rico McFarland, le Ford Blues Band, Charlie Musselwhite et Bettye LaVette. 

Roy Thomas Baker (1946-2025)

Originaire de Londres, Roy Thomas Baker commence à travailler comme ingénieur du son à la fin des années 1960 notamment pour des disques parus sur Decca, Deram et Blue Horizon par des artistes comme Savoy Brown, Errol Dixon, Chicken Shack ou Otis Spann ainsi que pour Dr. John et Osibisia. Dans les années 1970, il se lance dans une carrière de producteur à succès dans un registre essentiellement pop et rock (il est notamment le producteur du Bohemian rhapsody de Queen), collaborant également avec Dusty Springfield et les Trammps. 

Textes : Frédéric Adrian (sauf Abraham Yameogo par Christophe Mourot)