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Hommages / 02.12.2020

Herman Green (1930-2020)

Sans vraiment se faire connaître au-delà du cercle des amateurs confirmés, le saxophoniste Herman Green a été, pendant plus de soixante-dix ans, une présence quasi-constante sur la scène musicale de Memphis.

Fils biologique, même s’il l’a à peine connu, d’un membre de l’orchestre de W.C. Handy, Herman Washington, Herman Green fait ses débuts de musicien alors qu’il est encore scolarisé – comme nombre de futures stars de la ville – à la Booker T. Washington High School, accompagnant les concours de talent montés par Rufus Thomas, alors un DJ très influent.

Dès 1945, Green se produit sur Beale Street. C’est là qu’il rencontre un certain Riley King, dont il rejoint l’orchestre en 1947, participant notamment aux émissions de King sur la radio WDIA. L’année suivante, c’est le groupe d’Al Jackson – le père du futur batteur de chez Stax – qu’il intègre. L’ensemble est le “house band” du Palace Theatre, toujours sur Beale Street, et accompagne les vedettes de passage, parmi lesquelles T-Bone Walker et Big Joe Turner, ainsi que la génération montante : Ike Turner, Bobby “Blue” Bland, Howlin’ Wolf, Johnny Ace, Little Junior Parker, Albert King…

Au début des années 1950, c’est à la Plantation Inn qu’il se produit aux côtés de Willie Mitchell and Phineas Newborn Sr. Il fait également ses débuts sur disque en 1951, aux côtés de Rufus Thomas, pour quelques faces gravées dans les studios Sun et publiées sur Chess. Sa carrière est cependant interrompue par un séjour à l’armée – pendant lequel il a notamment l’occasion d’accompagner Marilyn Monroe ! – et c’est à San Francisco qu’il s’installe ensuite, se produisant dans différents clubs de la ville et croisant le fer sur scène aussi bien avec Miles Davis qu’avec Frank Sinatra. Dinah Washington, encore inconnue, chante régulièrement avec son ensemble. À la fin des années 1950, il rejoint l’orchestre de Lionel Hampton au sein duquel il reste une dizaine d’années et avec qui il tourne largement et enregistre régulièrement. Désormais installé à New York, il se produit également avec l’organiste Big John Patton ainsi qu’avec Lloyd Price, et enregistre ponctuellement avec celui-ci et avec B.B. King (l’album “Boss Of The Blues”). 

À la fin des années 1960, Herman Green quitte l’ensemble de Hampton et se réinstalle à Memphis, où il ne tarde pas à s’imposer sur la scène jazz avec son groupe, Herman Green and the Green Machine, tout en enseignant au Lemoyne-Owen College. De nombreux jeunes musiciens, parmi lesquels Kirk Whalum ou Mulgrew Miller, passent par les rangs de la Green Machine. Herman Green participe ponctuellement à des séances, notamment pour Stax : sa flûte se fait par exemple entendre sur le Never can say goodbye d’Isaac Hayes. Dans les années 1980, il rejoint le groupe FreeWord, avec lequel grave plusieurs albums et joue tous les dimanches soir au Blues City Café. Il publie également deux albums avec sa Green Machine dans les années 1990, ainsi qu’un disque crédité à Herman Green and the Memphis Blues and Jazz Quartet, et participe à des sessions occasionnelles pour Calvin Newborn et Jimmie Vaughan (album “Do You Get the Blues?”). Il continuait à se produire régulièrement jusqu’à très récemment, et son 90e anniversaire, en mai dernier, avait été célébré par ses amis musiciens avec une parade “socialement distanciée” devant son domicile… 

Texte : Frédéric Adrian
Photo © Paul Dagys

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