;
Hommages / 11.05.2022

Guillaume Petite (1948-2022)

Guillaume Petite n’a pas connu la carrière à laquelle il pouvait prétendre. Car si la musique occupait une grande partie de sa vie, il avait d’autres centres d’intérêt dans lesquels il a aussi excellé. Nous apprenons avec tristesse sa disparition, le 19 avril dernier à Marseille.

Né le 9 mai 1948, il fit ses études à Caen où il prit des cours de piano classique avant de découvrir Ray Charles par le disque et Memphis Slim lors d’un concert dans une MJC où il était allé avec un copain de lycée, Patrick Verbeke. Il amorce alors un virage musical radical et s’initie au blues et au boogie-woogie. Des études universitaires de physique l’amènent à Paris où il participe à une scène blues française encore embryonnaire, avec Patrick Verbeke et Benoit Blue Boy. 

Dans les années 1970, il intègre le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) à Saclay et passe deux ans aux États-Unis, à Boston. Un temps qu’il mettra aussi à profit pour découvrir et se frotter à la riche scène locale.

De retour en France, il poursuit ses deux carrières. Scientifique le jour, jusqu’à devenir conseiller scientifique à l’École polytechnique. Pianiste la nuit, multipliant rencontres et collaborations. Au fil du temps, son jeu de piano, fervent et imagé, lyrique et percussif, accompagne ses copains Patrick et Benoit, mais aussi Mox Gowland, Louisiana Red, Liz Mc Comb, Ruth Brown (au Be Bop Bar), Joe « Guitar » Hughes…

Avec Verbeke, il représente en 1990 la France au Beale Street Blues Festival. Nouvelle occasion de tisser des liens, notamment avec la “Queen of Beale Street”, Ruby Wilson qu’il accompagnera plus tard en France, au Quai du Blues à Neuilly-sur-Seine dont il sera un pilier du house band, y jouant avec James Peterson (le père de Lucky) et Detroit Gary Wiggins, parmi tant d’autres.

Venu au blues par Memphis Slim, Ray Charles et Otis Spann, la palette musicale de Guillaume s’était enrichie au fil des années, avec de nouvelles couleurs venues de New Orleans et particulièrement de Professor Longhair et du hard bop d’Horace Silver, du gospel et du funk aussi. Il chantait d’une voix éraillée et enjouée. Il pouvait se produire seul, comme sideman ou à la tête de son groupe dans lequel figurait à la batterie son fils Sylvain. Familier de Soul Bag, il avait notamment participé à la Nuit du Cirque d’Hiver pour les 25 ans du magazine, comme à la Bagneux Blues Night de 2004.

En 2013, il enregistra enfin un album sous son nom, “Des Hauts et des Bas”, réunissant compositions en français et reprises, soutenu par une “Blues Connexion” comprenant notamment Stan Noubard Pacha, Sulaiman Hakim, Steve Verbeke et Chris Henderson.

Depuis quelques années, il s’était établi à Marseille où il se produisait souvent en trio, mais, en mars 2021, on diagnostiqua le cancer du pancréas qui allait l’emporter un an plus tard. Il a été incinéré à Marseille le 25 avril dernier. 

Texte : Jacques Périn
Photo : Bagneux Blues Night, 2004 © DR