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Chroniques / 26.06.2019

Flying Lotus, Flamagra

Depuis ses débuts en 2006 sous son alias Flying Lotus, Steven Ellison ne cesse de brouiller les pistes entre hip-hop instrumental hérité de l’école Dilla-Madlib, electronica débridée et jazz futuriste. Cinq ans après le cauchemardesque “You’re Dead!”, concept-album sur l’au-delà, le beatmaker californien s’est inspiré du cinéaste David Lynch et de la thématique du feu pour cet énigmatique sixième album.

Moins barré et torturé que son prédécesseur, plus dansant et accessible aussi, “Flamagra” parvient à canaliser la créativité débordante d’Ellison dans des directions soul, funk ou rap, avec l’appui d’invités en provenance de ces univers (plus Lynch sur un spoken word flippant). Anderson .Paak oscille entre rap et chant sur un More mariant funk psyché et jazz astral à la Sun Ra. Drapée des cordes de Miguel Atwood-Ferguson et nappée des vocaux graciles de Solange, la soul lunaire de Land of honey n’aurait pas déparé le “When I Get Home” de cette dernière. Sur l’halluciné Burning down the house, George Clinton renoue avec l’esprit ténébreux du Wesley’s theory de Kendrick Lamar, déjà produit par FlyLo. Citons encore le synth-funk duveteux des Little Dragon sur Spontaneous.

Pourtant, le petit-neveu d’Alice Coltrane n’a pas besoin des autres pour briller. À la fois smooth et spasmodique, nostalgique et extatique, Takashi, irrésistible disco funk façon Kaytranada, nous tient en haleine grâce à ses multiples détours et relances. D’un All spies faisant songer à un remix du Survivor de Destiny’s Child signé Daft Punk au classique Say something fleurant la dramaturgie des Balkans, ce disque qui ratisse très large et long (1h07) peut déconcerter. Mais comme le dit David Lynch, « on n’est pas obligé de comprendre pour aimer, ce qu’il faut, c’est rêver ». Flying Lotus nous en offre 27 belles nouvelles occasions. 

Mathieu Presseq

Note : ★★★½
Label : Warp
Sortie : 24 mai 2019

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