Bluescamp 2023 et 141e Blues Station
28.11.2023
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Eric Clapton © Derek pour claptonweb.com
La dernière fois qu’Eric Clapton s’était produit à Bercy, c’était en compagnie d’une troupe de choc (les guitaristes Derek Trucks, Doyle Bramhall II et Robert Cray) et dans l’esprit de l’époque Derek & the Dominoes. En s’associant cette fois-ci à son vieux complice Steve Winwood, c’est un autre "supergroupe" qu’il rappelle au bon souvenir de ses fans : Blind Faith. Auréolé du succès rencontré par le récent double CD live enregistré au Madison Square Garden, le duo n’est pas venu pour simplement se contenter de la routine. Le groupe réduit (Steve Gadd à la batterie, Willie Weeks à la basse, Chris Stainton aux claviers et les belles deux choristes Michelle John et Sharon White) s’éclate autant que les deux vedettes, Weeks se permettant notamment quelques discrètes improvisations groovy, Stainton confirmant qu’il est sans doute l’un des meilleurs pianistes de blues d’Angleterre (il épaulait déjà Clapton lors de son "Blues Tour" de 1995).
Clapton et Winwood lancèrent les hostilités avec conviction et décontraction, donnant les signes d’une réelle envie de jouer (je n’avais jamais vu Clapton communiquer autant avec son public). Parti sur une route tranquille, le concert a alterné le bon, avec du rock bluesy sans prétention (par exemple Low down, qui aurait pu être interprété par les Rhythm Kings de Bill Wyman) et l’excellent, avec le meilleur du répertoire des deux hommes (notamment un somptueux Presence of the Lord), avant de franchir une dimension supplémentaire lorsque Steve Winwood prit les commandes d’une sublime version de Georgia on my mind. Quelle émotion !
Steve Winwood © Derek pour claptonweb.com
Eric Clapton, seul à la guitare (sauf quand Winwood lâchait ses claviers pour le seconder) montra le meilleur de lui-même tout au long du concert. Sobres et inimitables, ses interventions pleines de bons goût surent éviter les longueurs et mettre en évidence un toucher et une sensibilité qui n’appartiennent qu’à lui. Le set acoustique fut lui aussi très appréciable, avec un Driftin’ encore plus inimiste qu’à l’accoutumée, avec un Clapton habité murmurant presque et maniant l’art de la suggestion à la guitare, un Layla prenant chanté par tout Bercy et une superbe version de Can’t find my way home. Un regret, pas de Double trouble, mais à la place une version exceptionnelle, et je pèse mes mots, de Voodoo chile – le blues lent de Jimi Hendrix. Clapton propagea le frisson en annonçant, à l’unisson de sa guitare, l’intro du morceau, puis Winwood (l’organiste originel de la session de Hendrix) porta le morceau avec autorité, tandis que le guitariste, totalement possédé, semblait se servir de sa guitare pour dialoguer avec Jimi lui-même. Impression que venait renforcer l’intervention des choristes, comme des voix venues de l’au-delà. Ces quinze bonnes minutes de pur bonheur laissèrent le public totalement médusé.
Eric Clapton © Derek pour claptonweb.com
Une réussite, donc, qui nous fait retrouver l’Eric Clapton des grands jours et qui rend au non moins talentueux Steve Winwood la place d’honneur qu’il mérite.
YC
PS : merci au site français de référence www.claptonweb.com qui nous a confié les beaux clichés d’un de ses éminents contributeurs !