3 avril 2025

Ce jeudi soir d’avril, dans l’écrin feutré mais vibrant du Trianon, la soul francophone a vécu une soirée d’exception. En tête d’affiche, Enchantée Julia a présenté son premier album “Onze” avec élégance, entre neo soul sensuelle et R&B poétique, saluée par une nomination aux Flammes. 

En ouverture, Connie a immédiatement imposé sa voix et son univers. Dans la lumière tamisée, la chanteuse, accompagnée du guitariste Maxime Barcelona, livre un set acoustique de 45 minutes d’une rare intensité. Sans effets, elle déploie une musique sincère et habitée, portée par une voix fluide, légèrement rauque, oscillant entre soul parlée et folk introspectif. On pense à Tracy Chapman pour l’économie du geste, à Lianne La Havas pour les nuances, et à Arlo Parks dans l’art de dire doucement des vérités profondes. Connie alterne reprises et compositions personnelles, tissant une douce ambiance empreinte de vulnérabilité. Avant de quitter la scène, visiblement émue, elle évoque sa sororité artistique avec Enchantée Julia et annonce la sortie prochaine de son premier EP, une promesse discrète mais pleine de résonance.

Puis vient Enchantée Julia, qui entre sur scène avec la prestance d’une diva moderne, simple mais théâtrale. Sa voix douce, parfaitement maîtrisée, capte instantanément l’attention. Entourée de Vincent Tortiller (batterie), Antonin Fresson (guitare, basse), LaBlue (claviers) et les chœurs de Brice Pihan et Agyei Osei, elle entame Go et installe une atmosphère intime. Entre Sade et Jorja Smith, son style s’impose : soul sensuelle, écriture fine et émotion sincère.

Les morceaux s’enchaînent : Cinema, Save me, Fleur de peau… Julia joue avec les nuances, explore les émotions. Sur Moussa et Toucher toi, l’intensité monte d’un cran. Avec l’apport de Connie et Nka, ce dernier titre devient un moment de sororité pure, où la complicité est palpable. Un temps fort partagé avec un public attentif.

D’autres invités marquent la soirée : Prince Waly et Jazzy Bazz rejoignent Julia sur Ca$h et Onze, leurs flows tranchants contrastant avec la douceur de la chanteuse. Ces apparitions ponctuent le concert d’énergie et enrichissent le set d’une diversité bienvenue. La scénographie reste sobre et efficace : éclairages doux, absence d’artifices, musiciens mis à l’honneur. Ce dépouillement met en valeur chaque note, chaque mot, et crée une bulle d’intimité entre artistes et public. La sève offre un final en apesanteur. Le public, debout, applaudit longuement, porté par l’émotion.

Par sa maîtrise vocale, la richesse de ses compositions et la sincérité de son interprétation, Enchantée Julia incarne une soul moderne et profonde, à la fois sensible, engagée et résolument personnelle.

Texte et photos : Isha Sookee