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Chroniques / 27.09.2021

Eddie 9V, Little Black Flies

Sa bouille de gendre idéal tranche avec le ton et le son de ses disques. Dans cette troisième partition en tout juste deux ans (déjà un LP studio et un live publiés), Eddie 9V ne s’embarrasse pas à filtrer ce bleu électrique qui l’habite et nourrit ses compositions. Illustration assez directe en ouverture avec un Little black flies aux reflets soul blues qui donne son titre à ce nouvel album pour la marque Ruf. Même constat avec She got some money qui évoque le classique d’Elmore James Dust my broom branché sur un truc qui fait sûrement plus que neuf volts. 

Ces deux titres qui démarrent sur des conversations de studio captées par les micros ouverts (et conservés au mixage final) ont le (bon) goût du produit brut, le parfum d’un groove naturel et l’énergie de sessions enregistrées dans les conditions du live (après des mois de frustration due à la pandémie, il fait faim !). L’absence totale d’un quelconque vernis et des potars d’amplis flirtant avec le rouge offrent alors cette belle texture un brin rugueuse qui habille ces douze titres de blues électrique généreux et assumé. Des compositions maisons révélées par une orchestration très Chicago (orgue, basse, guitares, harmonica, batterie et un saxophone épisodique). De la trempe de ce qui pouvait sortir de chez les frères Chess : du beau son, du caractère et de la “soul-plesse” (mot soul-baguien qui évoque cette souplesse dans la soul music). 

Une reprise de Jimmy Reed par-ci, une de Howlin’ Wolf par-là (Miss James, pas la plus évidente) et ce funky Travellin’ man ­d’Albert King dont le jeune Eddie donne une version fiévreuse le propulsant illico dans la cour des grands. Homme pressé ou musicien fertile, Eddie 9V semble à l’orée d’une carrière dont la porte pourrait s’ouvrir très vite en grand. C’est tout ce qu’on lui souhaite.

Julien D.

Note : ★★★★ (Scoop)
Label : Ruf
Sortie : 28 mai 2021

Eddie 9VJulien DRuf RecordsSoul Bag 244