Doechii, L’Alhambra, Paris, 2024
07.11.2024
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25 mai 2024
Ne dit-on pas que “le diable se cache dans les détails” ? Ici, c’est dans la Duvel, bière locale hautement alcoolisée (duivel en néerlandais) et sponsor principal du plus convivial des festivals flandriens de blues. Difficilement trouvable en pleine campagne par les GPS francophones qui massacrent allègrement la prononciation des rues et des lieux, le breuvage diabolique se mérite dès l’arrivée. Deux tentes, sono impeccable, une grande terrasse avec sièges et parasols estampillés, un club house transformé en backstage aux faux tapis d’orient, une journée ensoleillée : que fallait-il de plus pour accueillir le nombreux public amical venu se réjouir de la belle affiche, un verre à la main ? Vous avez bien lu : le ballon de la marque, pas un vulgaire gobelet. Ont retenu notre attention :
Kaz Hawkins. L’imposante chanteuse irlandaise bastonne son blues “beuglant” avec accompagnement rock à claviers. Elle canonne, une bière sur l’ampli et transforme la tente bondée en tournée générale pour marins en rade. Toutefois, la comparaison avec Etta James s’arrête là.
Elliott Murphy. Autre vieille connaissance populaire. Son répertoire m’est inconnu, mais en favorisant l’accompagnement acoustique, dont une violoniste et un batteur plus percussionniste sur cageot que drummer, son long set d’americana énergique récolte de chaleureux hourras, entre Bob Dylan-John Hammond (harmonica en rack) et une sorte de pop folk West Coast des années 1960-70. Il reviendra, c’est sûr.
Tom Rigney & Flambeau. Ils avaient enflammé des éditions précédentes, ils nous reviennent, fidèles à leur mix dansant de cajun, zydeco, blues et boogie (Caroline Dahl au piano) entraînés par leur leader Tom Rigney, chanteur-violoniste dynamique. Ambiance bal de rue au 14-Juillet. Pas besoin d’un rappel racoleur : C’est la vie extrait de leur répertoire suffira amplement. Bel équilibre entre styles frais et novateur en provenance de San Francisco.
Eden Brent. J’adore cette chanteuse-pianiste, soliste énergique en live, contrairement à ses disques. Elle est unique : toujours basée à Greenville, au plus profond du Mississippi, elle fait tanguer son clavier électrique – aux tonalités acoustiques – avec une vigueur débordante, irrégulière – elle peut le frapper “à côté” tout en restant crédible – comme Boogaloo James, son bootlegger de mentor dans les juke joints enfumés. Et quelle voix puissante à l’accent sudiste ! Outre son propre répertoire, elle s’en prend aux blueswomen gouailleuses des tavernes : Lucille Bogan, Katie Webster… S’il n’en reste qu’une – et qui d’autre, sinon la pianiste Laura “Lala” Craig de chez Super Chikan ? – ce sera Eden Brent.
SaRon Crenshaw. Déjà venu en Flandres et rappelé depuis, ce bluesman de Caroline du Sud via New York m’a bien surpris : présence scénique non racoleuse, tonalités vocales et Gibson rouge à la B.B. King interprétant son propre répertoire, traditionnel certes, mais dans un registre Willie Dixon et avec une conviction sans affect. Groupe soudé à clavier. Il pourrait occuper une place concurrentielle au festival de Chicago. S’il revient dans votre région, je vous le recommande.
Texte et photos : André Hobus