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Live reports / 04.07.2012

Dr. John, Robert Randolph, GOV’T MULE / KENNY WAYNE SHEPHERD BAND

 

DR. JOHN & THE LOWER 911 FEAT. JON CLEARY

Festival “Nous n’irons pas à New York”, La Cigale, 4 juillet

ROBERT RANDOLPH & THE FAMILY BAND

La Maroquinerie, 9 juillet

GOV’T MULE / KENNY WAYNE SHEPHERD BAND

Le Trianon, 9 juillet

 

C’est véritable feu d’artifice pré-14 juillet qui attendait le public parisien au début de la période estivale. Le 4 juillet, Dr John sur scène n’avait rien à envier à Bruce Springsteen qui se produisait au même moment à l’autre bout de la capitale. Le placide septuagénaire a donné un show torride, aidé en cela  il est vrai par la chaleur qui s’est abattue au même moment sur la capitale : la formule facile “on se serait cru à la Nouvelle-Orléans” était cette fois-ci réellement de circonstance ! Lançant les hostilités avec le répertoire de son nouvel album, “Locked Down” (Nonesuch), le Docteur interpréta grosso modo la première face du disque en la funkifiant progressivement. Il plongea ensuite dans un répertoire typiquement New Orleans, assurant la transition entre les deux parties avec une version prenante de I walk on guilded splinters (s’achevant sur les notes de Croker courtbullion du premier album) : bien pensé ! A côté de passages évidents mais bien jouissifs (Right place, wrong time, Such a night en clôture…) Mac Rebennack sut surprendre ses plus vieux fans en privilégiant des morceaux faisant la part belle aux cuivres : eh oui, ils étaient de la partie ce soir-là, avec notamment une tromboniste remarquable, la charmante Sarah Morrow. Makin’ Whopee ! Si Dr. John était en si bonne forme, debout la plupart du temps derrière ses claviers, Jon Cleary n’a pas pour autant fait de la figuration, complétant bien le son énorme du groupe et se mettant même occasionnellement à la guitare. David Barard fut égal à lui-même à la basse : monstrueux, et l’on pourrait en dire autant de Raymond Weber (batterie) et John Fohl (guitare). Bref, un très grand moment de groove, supérieur aux derniers passages de Dr. John dans la capitale.

Un concert de Robert Randolph & the Family Band est toujours un moment de fête : à ne rater sous aucun prétexte, même si B.B. King en personne se produit ailleurs au même moment (ce qui était le cas ce soir-là !). On s’en serait voulu de louper ça : bien qu’assis derrière sa pedal-steel, Randolph dégage une aura et une énergie impressionnantes, faisant le show et suant à grosses gouttes. Si le répertoire est irrémédiablement rentre-dedans, funk et rock, le gospel reste la teinte dominante de chaque envolée glissante entreprise par Randolph : le style Sacred Steel dans tout son pouvoir d’entraînement. Qu’il invite les filles du public en transe à monter sur scène pour répondre aux injonctions du Shake your hips ou bien qu’il utilise son instrument pour souligner de manière envoûtante le chant divin de son bassiste Danyel Morgan sur I feel like pressing my way, Robert est un maître de cérémonies accompli. Hélas, trois fois hélas, pourquoi se sent-il obligé de jouer avec un volume sonore bien au-delà des limites de ce qui est physiquement supportable ? La fête en est presque gâchée. Pas de quoi, pourtant, nous passer l’envie de le revoir.

Au même moment, Warren Haynes à la tête de son groupe Gov’t Mule donnait au Trianon un concert au son nettement plus sage, bien que le répertoire ait été résolument rock. En première partie, Kenny Wayne Shepherd, heureusement rare sur les scènes françaises, joua à Stevie Ray Vaughan comme Johnny Rock, Johnny Star ou Johnny Vegas jouent à Johnny Halliday – avec la caution du propre batteur de « SRV », Chris Layton, présent à ses côtés !  Il est vrai que Layton, dont la frappe ne se caractérise ni par sa souplesse ni par son imagination, n’a jamais été l’atout majeur de Stevie Ray… Inutilement introduite par un intermède “people” (Philippe Manoeuvre copieusement hué), la prestation de Gov’t Mule fut bien meilleure, quoique tout de même en deçà de nos attentes. Les musiciens ne manquent pas de charisme et, au contraire de certains, ne se lancent jamais gratuitement dans les solos : avec “la Mule” (comme l’appellent les fans) les longues improvisations ne sont pas là pour épater la galerie mais pour  envelopper l’auditeur de musique et le faire décoller. On a pourtant rarement décollé ce soir-là, la faute à un répertoire trop passe-partout : il aurait fallu que le groupe joue plus longtemps et puise davantage dans ses racines blues et funky… Peut-être étions-nous trop bloqués sur des albums comme “The Deep End” (en 2 volumes) ou “Mulennium” (3 CD), mais la tournée de Warren Haynes en solo l’an dernier avait été plus jouissive. Pour nous consoler du retour sur scène des  petits joueurs Shepherd et Layton, Warren Haynes convoqua également lors du bœuf final deux membres du Robert Cray Band en vacances : Richard Cousins (basse) et Tony Braunagel (batterie) !
F. McQueen