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Brèves / 03.02.2018

Dennis Edwards, 1943-2018

Avec le décès, le 1er février 2018, l'avant-veille de ses 75 ans, de Dennis Edwards, c’est une page de l’histoire des Temptations qui se tourne : si Otis Williams, seul membre original survivant, continue à conduire la version officielle du groupe, Edwards en était le dernier des grands solistes encore vivant.

Né le 3 février 1943 à Fairfield dans l’Alabama, c’est dans l’église menée par son père que Dennis Edwards commence à chanter, une activité qu’il poursuit lorsque la famille déménage, vers ses dix ans, pour Détroit. À la maison, la musique séculière n’est pas la bienvenue, et c’est avec un groupe gospel qu’il fait ses débuts en dehors de l’église paternelle. La désapprobation parentale ne l’empêche pas de monter son groupe R&B au début des années 1960, Dennis Edwards and the Fireballs, puis de se lancer dans une carrière solo avec un premier 45-tours, Johnnie on the spot, arrangé par le vétéran des studios Motown Joe Hunter, publié sur le micro-label International Soulsville. En toute logique, c’est avec le label de Berry Gordy qu’il finit par signer en 1966. Après quelques mois d’inactivité, Motown ne sachant trop que faire de lui, il rejoint les Contours après le départ de Joe Stubbs, et c’est lui le soliste des derniers enregistrements du groupe avant sa séparation, et en particulier de son dernier tube, It’s so hard being a loser. Avant même la dissolution du groupe, Motown préparait Edwards à une carrière personnelle, lui faisant enregistrer quelques faces en soliste dès le début de 1967. Mais celles-ci resteront dans les archives jusqu’à leur parution sur un CD Kent en 2014.

 


The Countours (Dennis Edwards au centre)

 

Entre-temps, en effet, Otis Williams et Eddie Kendricks, les patrons des Temptations, ont choisi Dennis Edwards pour remplacer au sein de leur groupe David Ruffin, dont l’égo de plus en plus disproportionné et le comportement erratique ont fini par épuiser même ses plus proches collègues. En juin 1968, Edwards rejoint donc le principal groupe vocal masculin de Motown, devenant le premier “joker” du groupe après la période classique du “cinq majeur”. Les premiers temps sont un peu compliqués, Ruffin faisant tout pour saboter le travail de son remplaçant. Mais Edwards se fait vite sa place, sa voix nourrie de gospel s’intégrant parfaitement dans les arrangements complexes conçus par le producteur Norman Whitfield. Il est le soliste principal des principaux tubes du groupe entre la fin des années 1960 et le milieu des années 1970, de Cloud nine à Shakey ground en passant par I can't get next to you, Ball of confusion (That's what the world is today) et Papa was a rollin' stone – c’est Edwards qui attaque la chanson avec l’immortel « It was the third of September »

 



The Temptations (Dennis Edwards à droite) © DR

 

 

 

Après un certain déclin de la popularité du groupe, Otis Williams décide de renvoyer Dennis Edwards, alors que les Temptations quittent Motown pour Atlantic. L’opération n’est pas une réussite, et Edwards ne parvient pas à lancer une carrière personnelle. Il rejoint donc à nouveau les Temptations alors que ceux-ci retrouvent Motown en 1980. Il participe en 1982 à la réunion avec Eddie Kendricks et David Ruffin, avec qui il chante sur le tube Standing on the top, écrit et produit par Rick James.

 

 

 

Mais des problèmes personnels conduisent à son nouveau renvoi en 1984. Il se lance alors dans une carrière solo, toujours sur Motown, et décroche un beau succès avec Don't look any further, un duo avec Siedah Garrett.

 

 

 

Il se laisse néanmoins tenter en 1987 par un nouveau retour au sein des Temptations, qu’il quitte, cette fois définitivement, en 1989. Le reste de sa carrière se passera à faire fructifier son héritage, d’abord en collaborant avec Ruffin et Kendricks (il réenregistrera même avec celui-ci les principaux tubes du groupe), puis, à partir des années 1990 avec sa propre Temptation Review, avec laquelle il arpente le très lucratif circuit de la nostalgie aux États-Unis, mais aussi occasionnellement en Europe (à Jazz à Vienne en 2013 par exemple).

Frédéric Adrian

 


Chris Arnold, Mike Patillo, Bernard Gibson, Dennis Edwards, Vienne, 2000 © Brigitte Charvolin

 


Vienne, 2000 © Brigitte Charvolin

 


© DR