Muddy Gurdy, Seven
10.09.2024
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La rampe de lancement s’appelait “Freudian”, merveille d’album qui a marqué 2017. Un prometteur chanteur canadien devenait ambassadeur d’une soul R&B doucement enivrante. Vingt et un mois plus tard, Daniel Caesar remet le couvert. Tranquillement. Brillamment. Même garde rapprochée (notamment le tandem Jordan Evans-Matthew Burnett), même propension à s’abandonner dans un paysage déserté, là où par ses conseils la solitude prime sur la destination. Et toujours cette ambivalence grisante faite de groove qui se dérobe et d’introspection à fleur de peau.
Suspendue à ses lèvres et aux caresses de son falsetto angélique, sa musique forme un havre de beauté tourmentée. Même quand il invite des pointures qu’il admire, Caesar reste maître de chansons très personnelles qui dans leur charpente trouvent un bel équilibre entre classicisme et audace. Ainsi la façon dont s’entrecroisent sa voix et celle de Brandy (Love again), ainsi ce Frontal lobe muzik qui rebondit sur le registre grave d’un Pharrell. Et puis, à l’image d’un album bien plus profond que le laisse entrevoir une écoute furtive, cette “étude de cas” contient des perles dont la finesse des traits se révèle au fil du temps. C’est le cas de Superposition, splendide mélancolie planante tressée avec John Mayer à la guitare, c’est le cas de Complexities, lente ondulation qui débouche sur un chant en apesanteur.
Ses doutes, ses fragilités, Caesar les fait ressentir tant par ses mots qu’à travers sa manière de ciseler les syllabes. Si on retrouve çà et là un chœur ancré dans le gospel et de belles montées de sève (le divin Restor the feeling avec Jacob Collier), il manque peut-être juste à “Case Study 01” une chanson phare qui décroche la lune. Reste que Caesar nous porte à nouveau haut près des étoiles.
Nicolas Teurnier
Note : ★★★★½
Label : Golden Child
Sortie : 28 juin 2019