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Live reports / 18.08.2016

CHICAGO BLUES FESTIVAL, PART 1/2

Les finances de la ville s’enfoncent dans des profondeurs abyssales, avec des budgets successifs récusés par un gouverneur républicain ultra-libéral, mais Chicago maintient à flot ses diverses activités culturelles. L’affiche du festival de blues, toujours gratuit, l’annonçait riche et passionnant ; il fut grandiose et émouvant avec deux soirées ô combien mémorables : le 45e anniversaire de la marque Alligator et la clôture en hommage à Otis Rush. Si la météo si souvent capricieuse nous épargnera les orages brutaux et les sous-vêtements Damart, en revanche, les températures grimperont jusqu’à 33° C sous un soleil ardent, Grant Park offrant alors ses frondaisons rafraîchissantes. Compte rendu à force du poignet (photos et boissons) et marathonien entre les cinq scènes en présentation souvent simultanée. Sans parler des concerts pré et post festival.

Vendredi 10 juin

Peaches Staten : La pétulante petite chanteuse en vedette de Mike Wheeler conquiert toujours les festivaliers.

Maurice John Vaughn : Multi-instrumentiste (vo, kbd, g) et chanteur convaincant séduit par sa bonhommie et ses vignettes sur le quotidien. En invités, une vétéran du West Side : Sugar Babe (vo, b) et le jeune Floyd Wilson (g).

 


Peaches Staten © Brigitte Charvolin

 


Maurice John Vaughn © Brigitte Charvolin

 


Floyd Wilson © Brigitte Charvolin

 

Moreland & Arbuckle : trio choc qui arrache (g, vo, hca, dm), inspiré par la rudesse de Hound dog Taylor. Trop hard pour moi. Ça transpire, même sous les arbres.

Curtis Salgado (vo, hca) : contrairement à son dernier CD, il valorise le dépouillement artistique soul. Belle présence.

 


Curtis Salgado © Brigitte Charvolin

 

La violence du soleil sur le béton de l’allée centrale n’incite pas les curieux à écouter Bruce Iglauer et Dick Shurman devisant sur les 45 ans du label. C’est un amateur russe qui les interrogera sur Fenton Robinson, peu évoqué en général.

Grâce au sponsoring et à la collaboration artistique de l’État du Mississippi , une scène spécifique R&B est réservée à leurs artistes. Nous y avons vu : Sherman Lee Dillon (vo, hca, dobro) : blues rustique comme on en joue encore sur les porches. Pat Brown (vo) : chanteuse trop ballade soul à mon goût, avec synthé léché.

Le vétéran de Chicago, Eddie Shaw (vo, ts, hca) tient encore le groove mais son grand âge et une opération cardiaque ont un impact sur son ténor. Un accompagnateur remplit ce rôle. Toujours son fils Vaan au triple manche et en défenseur des Native Americans.

 


Eddie Shaw © Brigitte Charvolin

 


Vaan Shaw © Brigitte Charvolin

 

Le blues a -t-il un avenir ? La réponse est “oui” quand on voit l’énorme travail scolaire entrepris respectivement par la chanteuse Katherine Davis et Fernando Jones (vo, g), animateurs d’activités musicales diverses autour du genre. C’est assez émouvant d’entendre des dizaines d’enfants souffler dans un harmonica (dont des petites filles voilées) et chanter I’m ready de Muddy Waters.

 


Katherine Davis © Brigitte Charvolin

 


Katherine Davis et ses élèves © Brigitte Charvolin

 


Fernando Jones © Brigitte Charvolin

 

Fruteland Jackson (vo, g, perc) : Il m’a épaté. De bluesman acoustique solitaire traditionnel, il a évolué vers plus d'americana, de folk et de work songs, avec batteur et violoniste. Très sympa.

Omar Coleman (vo, hca) : Sonorités SB Williamson II-Junior Wells, privilégiant des rythmes funky. Le guitariste Peter Galanis reste sobre.

 


Fruteland Jackson et Inna Melkinov © Brigitte Charvolin

 


Fruteland Jackson © Brigitte Charvolin

 

Legends of Blues : Trio composé de Sam Lay (vo, dm) qui semble abandonner son rôle de guitariste-conteur en retrouvant la batterie mais le drive n’y est plus. Corky Siegel (vo, hca, p) reste très performant mais Marcella Detroit (ex-Marcia Levy, vo, hca), jolie voix époque Layla d’Eric Clapton, ne m’accroche pas.

Tommy Castro & The Painkillers : C’est le guerrier de la route, bottes usées, jeans, T-shirt et cheveux gras. Ça déménage, parfois au volume. Invité : l’étoile montante de Chicago, Toronzo Cannon (vo, g). Le 45e anniversaire d’Alligator commence fort, dans tous les sens du terme. Leurs duos de guitares sont excitants.

 


Sam Lay © André Hobus

 


Tommy Castro © Brigitte Charvolin

 


Tommy Castro, Toronzo Cannon, Randy McDonald © Brigitte Charvolin

 


Randy McDonald, Toronzo Cannon © Brigitte Charvolin

 


Randy McDonald, Toronzo Cannon © Brigitte Charvolin

 

Lil’ Ed & The Blues Imperials : C’est du rodé slide sur pointes de baskets rouges et fez scintillant. Là, c’est Corky Siegel (hca) qui vient swinguer avec eux. Et ça sautille de partout.

 


Lil' Ed, Corky Siegel © Brigitte Charvolin

 


Lil' Ed © Brigitte Charvolin

 

Shemekia Copeland (vo). Classieuse et puissante. Invité Alligator : Curtis Salgado (vo). Mamours et œillades complices. Ah, s’ils pouvaient enregistrer ensemble ! La chanteuse appelle alors Bruce Iglauer pour un hommage appuyé, ayant été le premier à croire en elle après avoir enregistré son père. Touchant.

 


Shemekia Copeland © Brigitte Charvolin

 


Shemekia Copeland, Curtis Salgado © André Hobus

 


Bruce Iglauer, Shemekia Copeland © André Hobus

 

Samedi 11 juin

Norma Jean Wallace (ex-Bruso) : Elle qui fut lancée mince et dynamique par Jimmy Dawkins revient en force et en rondeurs. Mike Wheeler (g) est aux commandes du groupe.

 


Nora Jean Wallace © Brigitte Charvolin

 

Eddie Cotton Jr. (vo, g) : Encore un grand oublié de nos scènes. Soul blues à la Little Milton, groupe très Jackson, Ms. C’est steak, patates, okra et gravy. Ambiance dynamique d’église et harmoniciste baveux. Longs solos de guitare qui élèvent l’âme.

 


Eddie Cotton Jr. © Brigitte Charvolin

 


Eddie Cotton Jr. et Southern Komfort Brass Band © Brigitte Charvolin

 

West Side Andy (vo, hca) : Absence de Barrelhouse Chuck (p), fort malade. Son harmoniciste est donc mis en valeur : Chicago blues traditionnel et solide. Billy Flynn (g) est sur tous les fronts.

Lazy Lester (vo, hca, g) : Casquette “50 ans de Sugar coated love” et son éternel sourire bonhomme, gouaille, accent traînant et harmonica country blues, il enchaînera tous ses hits avec facilité. Rockin’ Johnny et Little Frank (g) sont rompus à l’a peu près des tempos et le set sera intemporel.

 


West Side Andy © Brigitte Charvolin

 


Billy Flynn © Brigitte Charvolin

 


Lazey Lester © Brigitte Charvolin

 


Rockin' Johnny © Brigitte Charvolin

 

Chicago Blues Kings : Trop rock pour moi (surtout le guitariste, bruyant). Mais le plaisir vient de voir Gene Barge (vo, ts) en forme.

Wee Willie Walker (vo) : Bonne vieille soul cuivrée d’un revenant. L’église, ça aide !

 


Chicago Blues Kings, avec Gene Barge au centre © Brigitte Charvolin

 


Gene Barge © André Hobus

 


Wee Willie Walker © André Hobus

 

Irma Thomas (vo) : Le public ne se lasse pas d’entendre (et réclame) ses classiques de R&B sixties de La Nouvelle-Orléans. Plein d’entrain, tout l’orchestre les sert avec convivialité. Iko Iko est toujours aussi frais. Agitez les mouchoirs blancs !

 


Irma Thomas © Brigitte Charvolin

 


© Brigitte Charvolin

 

En compagnie du producteur Dick Shurman, nous passons Fred Wesley & The New JB’s pour trouver une table encore libre au Legend’s. Peine perdue. En attendant, Smiley Tilmon (vo, g) descend de scène (Kate Moss, b) et nous régale d’anecdotes ; Joe Moss (vo, g) monte. En trio, le frère de Nick canonne mais juste. Sorte d’Albert King en plus rock. La section rythmique soutient sans faille. Quelle dynamique !

La table est prête. 23 h 15 : enfin, celui que nous attendions, Chris Cain (vo, g), rarement en déplacement en club hors Californie. Après avoir embrassé sa guitare et chacun des membres de son groupe – pas des musiciens occasionnels – il s’embarque dans un set d’une heure trente, mélange de B.B. King-Robben Ford-Elvin Bishop dans des blues lumineux, chantés à la nuance près. C’est magique ! On en redemande. Effectivement, ce n’était là que son premier set. C’est (ce qui nous reste de) notre force physique qui veut rentrer.

André Hobus

 


Chris Cain © André Hobus

 

À suivre : la journée du dimanche 12 juin.