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Live reports / 24.07.2025

Cahors Blues Festival

CAHORS BLUES FESTIVAL 2025

du 10 au 12 juillet 2025

Cahors

Cette édition du Cahors Blues Festival – le plus vieux rendez-vous français initié voici 43 ans – fait suite à une année blanche. Après les rendez-vous manqués de 2020 et 2021 pour cause de Covid, le festival ne s’est pas non plus tenu en 2024 pour des raisons financières. L’équipe conduite par Robert Mauriès a pu repartir sur des bases resserrées. Les festivaliers étaient heureux de retrouver les bords du Lot, trois jours durant, sur le site spécialement aménagé devant la salle Valentré, à deux pas du célèbre pont du même nom. Des concerts sur une scène extérieure dès 17h30, puis dans la salle climatisée à la capacité respectable de 900 places, attendaient les fidèles et les nouveaux venus, attirés par une programmation pointue et variée, nationale comme internationale.

Soulignons en outre l’initiative du festival de soutenir le combat de l’association Constance contre la leucémie et d’organiser conjointement la « Biker day » avec les motards de la région. Constance est engagée auprès des enfants et des familles touchés par les cancers pédiatriques et particulièrement la leucémie, et a récemment été récompensée par la médaille d’argent du Grand Prix Humanitaire de France. Notons enfin la volonté du Cahors Blues Festival de soutenir les actions de France Blues en abritant dans ses murs le premier Forum France Blues Pro +.

Mardi 8 juillet

Dès l’avant-veille, devant le V&B jouxtant l’ancien site sur l’Allée Johnny Winter, les plus impatients des festivaliers pouvaient déjà profiter d’une pré-ouverture assurée avec punch et brio par le trio nordiste Hot Chickens, drivé de main de maître par son contrebassiste-chanteur Hervé Loison. C’était l’occasion de faire monter de quelques degrés de fièvre une température déjà largement estivale devant un parterre de rockers-danseurs conquis et ravis, tout comme celle de signaler en musique aux Cadurciens que le « Blues » revient en ville après deux ans d’absence, et qu’il convient d’en profiter.

Jeudi 10 juillet

Sur la scène extérieure, Luc Tran Van Président de la Toulouse Blues Society présente une carte blanche significative de l’activité des formations toulousaines. The B Blues Company – un pseudo correspondant au seul multi-instrumentiste Ben Jacobacci – ouvre le bal avec son blues épuré, son chant clair et parfois rugueux, s’accompagnant d’une batterie et d’une guitare. Compositions et reprises sont égrenées devant un public attentif. L’esprit du Delta-blues souffle sur toutes les têtes grâce à une démarche travaillée pour allier le respect du travail des pionniers à une interprétation personnelle et captivante.

Le quartet Bounce Back lui succède. Son chanteur Thierry Tréhet, harmoniciste passionné, entraîne alors le public vers un Chicago-Blues mâtiné de teintes californiennes. Les références qui se font jour tournent autour de William Clarke et de l’école de George « Harmonica » Smith, sans négliger Rod Piazza. La rythmique emmenée par le batteur Philippe Blomme est dynamique et efficace, les références attestent d’une connaissance approfondie du blues et le plaisir de chaque intervenant est évident.

C’est ensuite le trio de Thomas Sarrodie & the Bi-Polar Blues qui se présente devant un public qui s’est entre temps largement étoffé. L’expérience scénique du groupe impose d’emblée son univers par un set énergique, une cohérence de chaque instant entre le contrebassiste et le batteur et l’implication de son leader. A la guitare et au chant, Thomas Sarrodie endosse parfaitement le rôle de chef de file du power-trio sans pour autant tomber dans les travers de décibels propices à masquer l’absence d’une guitare rythmique ou d’un clavier. C’est avec sûreté et classe que l’ensemble déroule un répertoire racinien, tour à tour délicat ou teinté d’une énergie rock, utilisant la slide avec une belle maîtrise. Fort d’une belle expérience à l’IBC de Memphis (demi-finalistes en 2025), le groupe peut largement prétendre à agrandir son auditoire par des programmations hors-Sud-Ouest.

Climatisé, l’espace Valentré apporte un peu de fraîcheur au public qui se presse déjà nombreux pour un double-spectacle siglé « rhythm’n’blues ». La première formation, originaire de Pau, fait davantage trembler les cordes « soul » et « funk », offrant dès le premier titre un répertoire vibrant. The SuperSoul Brothers – et sister, pour sa chanteuse Claire Rousselot-Paillez – est un big-band constellé de talents individuels, tous tendus vers la réussite d’un show maintenant bien rôdé. Si le leader David Noël ne ménage pas ses effets pour que le public partage sa joie de chanter, l’ensemble le suit avec ferveur et justesse, le tromboniste Julien Suhubiette en tête. Le guitariste Pierre-Antoine Dumora tire son épingle du jeu par une rythmique sans faille et des solos bien sentis. On apprécie particulièrement les belles teintes jazzy du pianiste Julien Stantau. La rythmique « béton » de Ludovic Timotéo (basse) et Olivier Pelfigues (batterie) est parfaitement ancrée dans les exigences de justesse et de régularité que l’exercice impose : des nuances bien marquées, un soutien sans faille, d’exigeantes architectures de titres interdisant toute distraction. Car c’est bien là le travail le plus difficile qu’impose un répertoire à sept protagonistes : conjuguer des structures écrites à l’impression de facilité et de spontanéité apportant un caractère à la fois virtuose et festif à l’ensemble. Carton plein et succès populaire pour les béarnais, qui eux aussi avaient vécu de beaux moments lors de l’IBC de Memphis en 2024. The SuperSoul Brothers ont d’ailleurs bien mérité leur titre de « groupe de l’année 2025 » décerné par France Blues. En outre, ils représenteront la France en 2026 pour le prochain European Blues Challenge en Pologne.

Bernard Sellam a depuis longtemps maintenant tourné la page de son groupe Awek, la brillante formation qu’il dirigeait depuis 1994 et dont il a laissé le leadership au chanteur-guitariste Fabrice Joussot. Son quintet « The Boys From The Hood » est désormais son essentielle formation. Il y évolue aux côtés du bassiste Eric « Church » Léglise, du batteur Julien Bigey (longtemps vu au sein des fabuleux Double Stone Washed), des saxophonistes ténor Franck Mottin et baryton David Cayrou. Si c’est le pianiste Thierry Ollé qui remplace Damien Daigneau prévu (ils sont tous deux présents sur l’album), ce sont surtout les « soufflants » supplémentaires qui feront plus qu’étoffer le groupe. Transformant l’ensemble en véritable big-band dédié à la gloire des années 40-50, la section de cuivres transcende la démarche en la rendant encore plus enthousiasmante. Ce sont donc Philippe Sellam (le frère) au saxophone ténor, Nicolas Gardel et Simon Barrère aux trompettes et Guillaume Ceretto au trombone, qui s’ajoutent et qu’on adorerait voir tous « titularisés » au sein de la formation.

L’orchestre déroule un répertoire époustouflant, créé et recréé en hommage aux héros du rhythm’n’blues originel de l’immédiat après-guerre que furent BB King, Clarence « Gatemouth » Brown, Guitar Slim, Lowell Fulson ou Johnny Guitar Watson (seule incursion dans les années 60). L’assistance, déjà surchauffée par les Palois, se libère totalement sous l’action irrésistible des Toulousains. On danse frénétiquement, on s’empare des premiers rangs pour mieux vibrer aux sons conjugués d’un big-band incandescent. Impressionnante et libératrice, la musique est à la fois vintage par son orientation musicale combinant jazz, blues et rhythm’n’blues, et actuelle par une approche avertie, naturelle, experte. Les nombreuses compositions dans l’esprit, parsemant leur pantagruélique second album « Barnyard boogie » (14 titres), en attestent. En studio comme en live, le travail de mise en place exclut tout faux-pli et toute trace de brouillon, offrant au public un rendu des plus professionnels, digne des meilleurs clubs de jazz de New-York.

Avec un plaisir évident, Bernard Sellam drive l’orchestre avec bonhomie et pertinence, distribuant les solos à chacun sans le moindre flottement. « Let’s have a ball tonite » ! Un succès populaire incontestable, une musique universelle appréciée par toutes les générations du public. C’est tard, mais à regret, que nous devons quitter le dance-floor géant de Valentré, en attendant de nouvelles vibrations sur les deux autres journées du festival.

The SuperSoul Brothers / Bernard Sellam & the Boyz From The Hood = Pau / Toulouse, un match de rugby de haut vol dont chacun imaginera le score selon ses sensibilités, mais une rencontre aux allures de grande finale ! De quoi se réjouir du talent que nos musiciens français entretiennent depuis des années, n’ayant plus – depuis longtemps – à rougir de leurs équivalents d’Outre-Atlantique.

David Noël © J-M Rock’n’Blues
Bernard Sellam & the Boys From The Hood © J-M Rock’n’Blues
Bernard Sellam © J-M Rock’n’Blues
Guillaume Ceretto – David Cayrou – Philippe Sellam – Franck Mottin © J-M Rock’n’Blues

Vendredi 11 juillet

France Blues et la Toulouse Blues Society proposent dans l’Espace Bessières un forum pour fédérer et échanger autour des problématiques de la diffusion du Blues sous toutes ses formes, incluant une quarantaine d’acteurs du Blues en France. Les intervenants peuvent ainsi participer à 3 heures de réflexion constructive et se voir proposer des solutions pérennes d’organisation pour faire que le Blues soit une musique mieux et davantage perçue par un public croissant et renouvelé, dans un contexte économique difficile et peu favorable à la culture dans son ensemble. Les thématiques, présentées par différents intervenants, furent nombreuses et denses :

  • Créer une Blues Society pour soutenir le blues en local,
  • Adapter son modèle économique dans une période de restriction budgétaire.
  • Assurer une communication efficace à l’ère des réseaux sociaux et de l’IA.
  • Intermittence : actualité des droits, aides à la tournée, droits d’auteur.
  • Les jeunes et le blues : rajeunir le public, initier de nouveaux projets.

Elles demanderaient un temps accru pour être mieux défendues et développées. C’est cependant un temps riche et encourageant, qui incite à davantage fédérer les efforts déployés chez nous pour faire que le blues reste une musique vivante et appréciée. A suivre avec les actions de France Blues, notamment.

Retour sur la scène extérieure, au soleil implacable de Cahors, pour une programmation résolument « Sud-Ouest » avec tout d’abord le duo formé par le guitariste-chanteur-percussionniste Fabrice Joussot (Flyin’ Saucers, Awek) et l’harmoniciste Stéphane Bertolino (Awek). Quasi Blues, duo de talent qui se connaît et joue ensemble depuis longtemps. C’est tout naturellement qu’ils déploient leur savoir-faire devant un parterre d’aficionados présents devant la scène bien avant le début du concert. Leur répertoire parfois classique est emprunté aux meilleurs, ré-arrangé à la sauce Quasi Blues, ou composé dans l’esprit, s’échappant parfois du blues pour des horizons plus soul. Un concert généreux qui a reçu des applaudissements nourris et mérités.

En catégorie « espoirs », The Blues Kid Combo était jusque-là parmi les favoris des bluesmen du Sud-ouest. Après cette magnifique prestation à Cahors, Enzo Cappadona passe directement parmi les meilleures découvertes récentes à l’échelon national. Avec une culture blues installée et bien ancrée malgré sa jeunesse (il vient d’obtenir son bac), ce guitariste-chanteur né en 2007 à Marseille fréquente depuis son enfance les musiciens qui l’ont fait grandir, d’Albi à Toulouse en passant par l’émission « The Voice Kids » et un premier passage à Cahors en 2019. Devenu entretemps membre d’honneur du musée européen du Blues en 2022, Enzo Cappadona confirme tout le bien qu’on pense de lui par un chant assuré, clair et puissant et un jeu de guitare électrique plein et pur, totalement dépourvu des outrances en décibels habituellement servies par les jeunes prodiges de la six-cordes. Le répertoire, intelligemment construit, ne fait pas forcément la part belle au classiquement indispensable Hoochie coohie man qui l’a vu se qualifier à la télé. Un public chaleureux, reconnaissant de constater en Enzo Cappadona le renouveau du blues dans le respect de ses codes, a réservé un accueil magnifique à son combo / quartet, dont les autres membres ne sont guère plus âgés que lui et assurent tout autant, sans fioritures. Un formidable concert du Blues Kid Combo, on en redemande et on attend impatiemment octobre pour la sortie de leur tout premier album.

Haylen, jeune parisienne bien connue des Cadurciens, puisqu’elle a remporté le Mississippi Blues Trail Challenge voici deux ans, ouvre la grande scène. C’est en grand format qu’elle peut montrer ses talents à un public encore plus nombreux qu’hier et constellé de fans de la première heure. Si on pense bien sûr à Amy Winehouse pour l’attitude et quelques intonations vocales, Haylen tâte aussi fort bien de la six-cordes et ne laisse pas toutes les parties de guitare à son ami Philippe Almosnino, l’ex-guitariste des Wampas ayant aussi collaboré entre autres avec Louise Attaque, Vanessa Paradis et Johnny Hallyday. Le jeu de ce dernier, s’il est bien sûr marqué « rock », est celui d’un « riffeur » qui sait aussi s’exprimer dans de belles envolées en solo, embarquant le public dans de remarquables volutes colorées sans assourdir personne inutilement.

C’est dans une belle osmose avec son claviériste (évoluant aussi au B3 avec une cabine Leslie) et sa section rythmique – dont le batteur pourrait parfois alléger son jeu – que le chant haut, clair et puissant d’Haylen va tour à tour charmer et emporter chacun. Empruntant à James Brown un I’ll go crazy aux structures revisitées et un It’s a man’s man’s world prétexte à réaffirmer les droits des femmes, son auteure Betty-Jean Newsome n’ayant justement pas été rétribuée par James Brown qui s’en serait inopportunément attribué les droits. Un joli raccourci de l’état de l’égalité entre humains.

Haylen joue de son physique accrocheur, sait susciter l’émoi et solliciter le public qui adore chanter avec elle, sur des ambiances alternant le rock, le slow bluesy ou les rythmes mambo, reprenant de façon troublante Baby please don’t go dans la même veine et avec les mêmes intonations de voix que le fait Véronique Sauriat avec son groupe Mama’s Biscuits. I just want to make love to you mettra tout le monde d’accord, et le final Misirlou de Dick Dale popularisé par le film « Pulp fiction » de Tarantino enfoncera le clou. Un concert rock-blues (majoritairement rock) largement plébiscité par un public enfiévré, regrettant de ne pas en entendre davantage.

Mais il faut à présent laisser la place au Chicago-blues du band de Nick Moss, le guitariste-chanteur natif du New-Jersey qui, avec son jeune batteur virtuose Pierce Downer et son bassiste-contrebassiste brésilien Rodrigo Mantovani, s’apprête à enflammer les plus grands fans de blues de l’assistance. C’est aidé du bouillant et séduisant harmoniciste californien Dennis Gruenling que Nick Moss fera encore monter d’un cran la température, n’abusant pas de ses atouts techniques – la vitesse, la constance, l’endurance, la virtuosité – et sachant faire respirer certains titres pour laisser à chacun la liberté de prendre un peu la lumière.

Rodrigo Mantovani, en habile musicien cultivé et passionné, saura faire applaudir à tout rompre, sachant puiser à l’étude du jeu des créateurs d’autrefois certains plans que les autres contrebassistes contemporains ont à présent tous oubliés. Le discret Pierce Downer, 23 ans seulement, prendra lui aussi un solo de batterie d’anthologie, mais surprendra tout du long par un jeu à la fois sobre et d’une richesse incroyable.

Les deux derniers albums Alligator de Nick Moss sont à l’honneur. La place de chanteur de Dennis Gruenling se réduit à la portion congrue, se concentrant sur des interventions pleines d’efficacité à l’harmonica brûlant, jouant de ses atours vestimentaires et capillaires chamarrés, d’un goût habilement travaillé. Notons que l’homme dépasse largement le statut de musicien, fabriquant depuis Los Angeles des micros d’harmonica vintage à destination d’un public mondial.

Nick Moss s’amuse à nous parler longuement, s’apercevant que le niveau d’anglais de l’assistance dépasse à peine celui de français qu’il possède. Qu’à cela ne tienne, le blues est un langage universel et il s’agit ce soir de nous transporter, depuis une partie de la scène seulement. Car, ramassés sur le côté cour et serrés comme s’ils occupaient la simple estrade d’un club afin de mieux ressentir les vibrations des trois autres, le quartet semble plus à son aise ainsi pour nous faire vibrer sur des shuffles mordants, des jump-blues swinguants et des blues lents brûlants d’intensité. On apprécie l’énergie incroyable dégagée par les quatre hommes : quelques regards échangés avec des amis avertis en disent long sur le niveau qu’atteint ce concert. Mais comment pourrait-il en être autrement avec de tels lascars ? Surtout quand Alabama Mike apparait en invité ! Une soirée idéale, dont le souvenir ne sera pas estompé par celui du lendemain, pourtant excellent lui aussi. (ML)

The Nick Moss Band © J-M Rock’n’Blues
Nick Moss © J-M Rock’n’Blues
Dennis Gruenling © J-M Rock’n’Blues
Alabama Mike © J-M Rock’n’Blues

Samedi 12 juillet

Un vent fort souffle sur le village du festival en ce samedi après-midi, apportant petit à petit de sombres et gros nuages. Cela n’empêche pas le duo Bourbon Street, avec Eric Vacherat à la guitare et au chant, et Cyril Menet à la guitare, de commencer son set et proposer ce blues ancré dans la tradition qu’ils jouent avec conviction depuis des années et qu’on a toujours plaisir à retrouver. Ils reprennent Tampa Red, Robert Johnson, Blind Willie Johnson, et placent leurs compositions, Moving on down the line et I’ll find my way, sur laquelle ils invitent l’harmoniciste Richard Plaut.

Mais la pluie redouble et il faut malheureusement interrompre leur concert.

La direction du festival décide alors de déplacer l’intervention du Kévin Doublé Quartet dans le hall de l’espace Valentré et les équipes techniques s’affairent efficacement à rendre cela possible. C’est un mal pour un bien car le concert qui en résulte est tout en proximité et intimité entre les musiciens et le public. Kévin Doublé à l’harmonica et au chant, Pierre le Bot au piano, Anthony Muccio à la contrebasse et Gabor Turi à la batterie, enchantent ceux qui les connaissent déjà et ébahissent ceux qui les découvrent, avec leur blues jazzy, fait de reprises érudites et de compositions sensibles.

Non seulement Kévin chante et joue de l’harmonica avec classe et bon goût mais il communique avec humour et gentillesse, finissant d’acquérir le public à sa cause. Kiddio, Fishing blues, I done got over, les piliers du répertoire s’enchainent, avec la douce composition Crazy world, la reprise dynamique de Sixteen tons et d’autres comme Senior blues de Horace Silver. Ce quartet et sa musique sont uniques sur la scène actuelle.

Bourbon Street (Richard Plaut – Cyril Menet – Eric Vacherat) © C.Mourot
Kévin Doublé Quartet © J-M Rock’n’Blues

Koko-Jean & the Tonics ouvrent la grande scène et sont de suite au taquet. Même si on sait à quoi s’attendre, pour les avoir déjà vus plusieurs fois, on reste captivé par la fougue de Koko-Jean Davis au chant, bien accompagnée par Dani Baraldés à la guitare, Victor Puertas aux claviers et Marc Benaigues à la batterie, et heureux d’en profiter. Le groupe a deux beaux disques à son actif et peut puiser dans son répertoire. Koko-Jean chante, danse, virevolte, prend de nombreuses poses tout aussi millésimées que photogéniques, affirmant par là sa personnalité, sa féminité volontaire et son engagement.

Dani Baraldés est souriant et incisif à la guitare, et Victor Puertas déploie des nappes d’orgue ultra groovy. Changement de tenue de Koko-Jean, descente dans le public avec Dani, solo d’harmonica de Victor, les temps forts abondent, et laissent le public chaud bouillant pour la suite.

Koko-Jean Davis © B.Charvolin
Koko-Jean Davis © C.Mourot

Kid Andersen et son Greaseland All Stars vont répondre de suite aux attentes. Kid à la guitare – prêtée par Bernard Sellam – et au micro, Lorenzo Farrell à l’orgue, D’Mar Martin à la batterie et les Capitol Horns, Alexandre Galignié au saxophone et Guillaume à la trompette, que le malicieux Kid, sans doute en référence aux événements du Capitol à Washington, et « parce qu’ils sont français », renomme illico les « Freedom Horns », mettent la salle en température, avant d’accueillir le légendaire Rick Estrin.

Costume orange, silhouette légèrement voutée, moustache fine de marlou et sourire gouailleur, l’homme, toujours selon Kid Andersen, « est à Greaseland ce que Ioda est à Star Wars » ! Calling all fools, lui répond le maître en chanson, avec un harmonica chromatique au son énorme. Il lance ensuite un instrumental à la Little Walter avant de revenir au chromatique pour introduire un beau blues lent dont il joue le solo au diatonique à douze trous, juste après un solo tragicomique de Kid à la guitare.

Rick sort de scène et Lisa Andersen apparait pour chanter l’entrainant Rock bottom, puis accompagne Kid sur Nobody’s fault but mine. Kid continue seul sur un blues rock lent, avant que Lisa revienne pour Slipped through my fingers avec les Freedom Horns et une ballade soul sudiste. C’est alors qu’elle laisse la place à Alabama Mike dont une tenue dont il a le secret, noire à poix blancs, foulard assorti et grosses lunettes blanches. De quoi remettre en cause le status quo comme il le chante sur ce classique de son répertoire, puis parler de son premier amour « qui pesait 150 kilos ».

Rejoint par tout le All Stars, Mike envoie les morceaux qui lui permettent à chaque fois d’emballer le public, Mississippi, et surtout Fat shame, avec force contorsions, lancer de t-shirts dans le public, coups de sifflet, bien aidé par D’Mar Martin et son grand numéro de saut par-dessus la batterie – un défi lancé à tous les photographes – , descente dans le public, et percussions sur tout ce qui présente à lui. Il ne peut pas y avoir de rappel après un tel spectacle, même si on est un frustré de ne pas avoir pu plus profiter de Rick et Mike. Quelle soirée ! (CM)

Textes : Marc Loison pour les 8, 10 et 11 juillet, Christophe Mourot pour le 12

Photos : Brigitte Charvolin, Jean-Michel Rock’n’Blues, Christophe Mourot

The Capitol Horns (Guillaume Horgue – Alexandre Galignié) © B.Charvolin
D’Mar Martin © B.Charvolin
Alabama Mike © C.Mourot