Un des secrets les mieux gardés de l’histoire du blues vient d’être éventé par la faute du label britannique Rhythm and Blues. On ne pourra plus se gargariser entre initiés du jeu innovant, parfois cinglant, du guitariste ou de la voix haute au falsetto ravageur du chanteur à l’impeccable brushing. Le commun des mortels peut maintenant accéder à la quasi-intégralité de sa discographie pré-Black Top, ses 45-tours en nom propre comme ses contributions, souvent cruciales, à des titres de Bo Diddley, Paul Williams, Nat Hall ou Billy Clark.

Occasion aussi de survoler les courants musicaux, R&B, doo-wop, soul, funk, avec toujours le blues en ligne de mire. On peut ainsi se régaler de deux temps forts, incontournables, la version embrumée et originale de Blues get off my shoulder (devenu un standard grâce à Little Milton ou Robert Cray) et le fameux Watch your step et son riff iconique dont les Beatles firent leur miel (I feel fine) et tant d’autres à leur suite (Led Zep avec Moby Dick). Parker supporta stoïquement que Berry Gordy s’attribue en 1959 la paternité du You got what it takes (n° 2 R&B par Marv Johnson) qu’il avait gravé deux ans plus tôt sur Vee-Jay mais qu’on avait oublié de déposer ! Cet homme étonnant qui ne sut pas gérer sa carrière, même lorsque Hammond Scott le retrouva en 1995 et lui donna l’occasion d’enregistrer deux albums sur Black Top.

Le premier CD présente 30 pistes où il est particulièrement en lumière (vous ne manquerez pas l’admirable et raycharlisant Steal your heart). Le second propose une bonne demi-heure d’un excellent concert inédit en 1995, puis aligne 16 plages où sa présence en sideman est moins prégnante mais attestée. Même si on peut l’écouter en streaming, il faut acheter cette anthologie superbement réalisée pour profiter du formidable livret (bio, photos et vraie discographie). 

Jacques Périn

Note : ★★★★★ (Le Pied !)
Label : Rhythm and Blues
Sortie : 8 août 2020