Soba, Fiman
11.10.2024
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Blues sur paroles est une anthologie de textes traduits présentés comme « une histoire originale du blues depuis 1920 par le texte même ». Notre pays a étouffé les langues rurales et populaires au profit d’un langage et d’une pensée urbains et académiques, qui se veulent universels. La langue du blues est celle d’une population rurale déplacée, opprimée et ségréguée. Lui trouver un équivalent français supposerait un travail archéologique pour reconstruire une langue disparue. Olivier Apert ne se lance pas dans ce travail, et il serait trop exigeant de lui reprocher. Il dit que la « parole-blues » est une expérience avant tout individuelle et rebelle plutôt que sociale et révoltée. On ne voit pas pourquoi ce ne serait pas tout ça à la fois. Son approche fonctionnerait mieux si la « parole-blues » était seulement une expression individuelle d’un sentiment universel. Mais elle est aussi un idiome collectif lié à une histoire locale. L’auteur cite Michel Torga : « l’universel, c’est le local moins les murs » ; attention cependant à ce que le toit du local ne vous tombe pas sur le coin du bec.
Benoit Gautier
Blues sur paroles
Par Olivier Apert, Le Temps des Cerises, 328 p.