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Live reports / 24.01.2013

BEAUTIFUL SWAMP BLUES FESTIVAL

En fait, The Beautiful Swamp Blues Festival se déroule sur deux semaines avec des concerts dans la ville de Calais et se clôt avec trois soirées de prestige au Centre Culturel Gérard Philipe. Dont nous rendons compte ici.

Vendredi 23 novembre

C’est le trio de Fred Chapellier qui ouvre la soirée. C’est l’un des guitaristes français les plus en vue. Fort bien soutenu par Abder Benachour à la basse et Denis Palatin à la batterie, la première partie du set est agréable, avec un soliste techniquement irréprochable, des titres sympas comme Night work ou Big legged woman, même si le tout manque d’âme et c’est dommage. Louable intention de Fred Chapellier de partager son set avec la relève des musiciens de blues français.


Fred Chapellier
 

La première à entrer en scène est Rachelle Plas. Chanteuse-harmoniciste pleine de fougue, elle ne fait pas dans la facilité avec des interprétations méritantes de Stormy Monday blues et de Proud Mary. Autre jeune en devenir, Charlie Faber. Lui, il donne dans le registre «  guitar hero du futur », jouant beaucoup de notes, mais, sur ce qu’il nous donne à entendre, le feeling est aux abonnés absents. Un goût d’inachevé pour les prestations de Rachelle et Charlie, mais ils sont jeunes et nous aurons n’en doutons pas l’occasion de les ré-entendre.


Rachelle Plas


Charlie Faber
 

Après le blues made in France, un tour dans les campagnes américaines avec un trio inattendu. Pour commencer, Dr. Burt. Ce bluesman du Mississippi est soutenu par la Music Maker’s Foundation qui le fait enregistrer et tourner régulièrement. Il produit un blues brut, et son chant incantatoire est marqué par un accompagnement minimaliste à la guitare mais très prenant. À retenir une très belle version racinienne de It hurts me too.


Dr. Burt
 

Lui succédant Keith B. Brown (le Skip James du film "The soul of a man" de Wim Wenders) nous emmène  pour une balade faite de titres enlevés ou plus low down avec une épatante version de Don’t be cruel, toujours accompagnés de passages finement ciselés à la guitare acoustique. De l’excellent Keith B. Brown.


Keith B. Brown
 

Dernier du trio, Harrison Kennedy l’inconnu de la soirée… car beaucoup ignore qu’il fut l’un des leaders d’un groupe soul The Chairmen of the Board qu’il quitta au milieu des années soixante-dix pour entamer une carrière solo plus empreinte de folk et de blues. Multi instrumentiste, il nous régale des belles pièces sorties de ses recueils "Shame The Devil "" et "Sweet Taste", tantôt à la guitare, tantôt à l’harmonica ou encore au banjo. Pour terminer, Keith B. Brown revient pour chanter avec Harrison Kennedy ce bon vieux standard de Jimmy Reed Baby what you want me to do.


Harrison Kennedy
 

Dernier plateau et retour vers du blues urbain avec Jimmy Burns qui nous offre un bon spectacle de Chicago blues avec beaucoup de titres originaux. Bon guitariste, bon chanteur et honnête harmoniciste, il fait preuve de personnalité et se comporte comme un leader, laissant s’exprimer ses musiciens (Tony Palmer, guitare ; Greg Mc Daniel, basse ; Brian T. Parker, batterie).


Jimmy Burns
 

Invitée du show, la chanteuse Katherine Davis s’est avérée décevante avec une voix mal assurée et une présence scénique assez empruntée. Par contre, c’est une chanteuse qui ne s’inspire pas de  Koko Taylor, mais se réfère plutôt à Bessie Smith et Etta James dont elle reprend Tell Mama. L’intensité du spectacle ayant légèrement baissé, Jimmy Burns va en remettre une grosse couche pour finir ce concert avec éclat.


Katherine Davis
 

Samedi 24 novembre

Il revient au chanteur-harmoniciste Youssef Remadna d’ouvrir la deuxième soirée du festival. Bon  chanteur et harmoniciste de premier ordre, il conquiert rapidement le public par des interprétations convaincantes des classiques du Chicago blues ou du Swamp blues de Louisiane (le monsieur a une prédilection pour Lazy Lester et Slim Harpo). Ce qui ne gâte rien, il est entouré de musiciens très talentueux comme Stan Noubar Pacha (guitare), Thibaut Chopin (basse) et Denis Agenet (batterie), sans compter le concours amical de Dominique Floch invité à partager quelques mesures d’harmo. Le set est rondement mené avec un sérieux dans les interprétations qui n’exclut pas l’humour décapant de Youssef. Un excellent moment.


Youssef Remadna
 

Autre bon moment avec un duo inédit dans nos contrées, celui formé par le guitariste Eddie Taylor Jr et l’harmoniciste Steve Guyger.


Eddie Taylor Jr.
 

Même si Eddie Taylor ne révolutionne pas le Chicago blues, il est cependant un honnête artisan du style, au jeu de guitare délié et au chant appliqué. Mais le vrai plus, c’est la présence pour l’épauler de Steve Guyger avec des solos d’harmonica incisifs et une belle présence vocale. On pourra seulement leur reprocher un répertoire trop convenu…


Steve Guyger
 

Dernier invité du jour, The Siegel Schwall Band. Cet orchestre est mené par Corky Siegel (vocal, keyboards, harmonica) et Jim Schwall (vocal, guitare). Le premier fait preuve d’une belle énergie sur scène, mais, son jeu d’harmonica me semble un peu brouillon, de plus ce n’est pas un grand vocaliste même si l’on relève une bonne version du classique I am a king bee.


Corky Siegel
 

Quant à son  compère, guitariste de talent,  avec sa prestation du jour très axée rock, il est vraiment loin de la note bleue… On pourra se consoler en réécoutant l’opus Three pieces for blues band de William Russo qu’ils gravèrent en 1973 sous la direction de Seiji Ozawa.


Jim Schwall
 

Un mot sur les concerts de l’après-midi qui attirent toujours beaucoup de monde. Durant cette édition, ils ont mis en valeur Marc André Léger, Steve Morrisson & Alan Glen, et surtout Dawn Tyler Watson accompagnée de son complice Paul Deslauriers à la guitare. La chanteuse canadienne a une très belle voix et une belle présence scénique. Curieusement je la trouve plus intéressante dans des titres comme Ne me quitte pas ou Come together plutôt que dans des standards comme Big boss man. Mais ses prestations sont toujours de qualité, et toujours très appréciées.


Dawn Tyler Watson
 

Dimanche 25 novembre

La dernière soirée de cette édition commence avec Terry "Harmonica" Bean. Ce natif de Pontotoc dans le Mississippi joue de la guitare et de l’harmonica pour accompagner son chant. C’est un artiste qui a une envie de jouer qui fait plaisir à entendre, même si quelques pains viennent "agrémenter" son jeu de guitare. Son répertoire ne brille pas par l’originalité (I got my mojo working, Hoochie coochie man, I’m a man…), mais il y met vraiment de la conviction, et il est très bien accompagné par Mike Green à la guitare, Simon Boyer à la batterie (notre photo d'ouverture) et Fred Jouglas à la basse. La fin de son show est plus étonnante avec une belle version de Since I met you baby, un titre rarement repris, et une version sur-vitaminée de When the saints. Musicien attachant, Terry "Harmonica" Bean a vraiment conquis le public.


Terry "Harmonica" Bean
 

Pour clore le festival, on a fait appel à Shemekia Copeland qui, au fil des recueils, est en train de s’affirmer comme la nouvelle grande dame du blues. Son set est principalement basé sur les titres de son dernier album "33 1/3". Shemekia est une superbe interprète, au service de textes intéressants et de chouettes mélodies. Si elle met beaucoup d’émotion dans des titres comme Ain’t gonna be your tatoo, elle est aussi très drôle pour expliquer sa prise de distance avec l’église (Somebody else’s Jesus) ou avec Memphis (Never going back to Memphis).


Shemekia Copeland
 

Show sans faute avec des musiciens au top (Arthur Neilson et Willy Skandlyn, guitares ; Kevin Jenkins, basse ; Morris Roberts, batterie) qui soutiennent leur patronne et répondent à ses sollicitations. Elle alterne tempi rapides et tempi lents et nous offre un autre moment très intense avec la reprise de One more time de son père Johnny Copeland. Elle finit en beauté par un entraînant Let the good times roll. Pas de doute elle à tout d’une grande.


Arthur Neilson et Willy Skandlyn
 

Remercions Dominique Floch et son équipe pour la réussite de cette neuvième édition.

Texte Alain Jacquet – Photos Christian Mariette