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Brèves / 07.06.2011

Beale Street orpheline

Ce 26 avril 2011, en remontant Beale Street à Memphis, face au King’s Palace Café, nous approchons un trompettiste pour l’écouter quelques instants et le photographier. C’était Rudy Williams, un « pilier » de la musique locale. Oui, c’était, car aujourd’hui, difficile d’admettre que la photo publiée ci-contre restera comme l’une des dernières de l’artiste. En effet, le 2 juin 2011, un médecin légiste du comté de Shelby a confirmé que le corps en état de décomposition retrouvé le 31 mai dans les bois proches du quartier de Whitehaven était bien celui de Rudy Williams. Même si les circonstances sont pour l’heure assez mal établies, il semble mort de causes naturelles. Le 22 mai au matin, il a quitté son domicile à pied, probablement pour aller acheter des cigarettes, et personne ne l’a ensuite revu vivant. On manque également d’éléments biographiques sur ce trompettiste qui était âgé de 70 ans et qui avait commencé à jouer de la trompette encore enfant, avant d’apparaître un temps au sein du Booker T. Washington High School Marching Band. Mais il était un des derniers musiciens à avoir connu la Beale Street « d’avant », entendez avant qu’elle ne soit corrompue par le tourisme, un des derniers « vrais » artistes authentiques à se produire ici, un des derniers garants d’une tradition qui ne cesse de s’effilocher… Celui que l’on appelait également le maire de Beale Street en était d’ailleurs pleinement conscient : « I just want to keep a part of what used to be on Beale Street alive today. » Apprécié et respecté de tous (sa disparition a généré une profonde et unanime émotion sur place), Rudy Williams jouait sur Beale Street depuis plus de 50 ans, et il s’était notamment produit ici lors de l’inauguration de la statue érigée en hommage à W. C. Handy le 1er mai 1960… Avec cette disparition, Beale Street laisse une nouvelle part de son âme.