Jubu Smith, Jubu
04.10.2024
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Décidément, Aretha et “Amazing Grace” n’ont pas fini de nous enchanter. En janvier, quelques amateurs ébahis (dont Frédéric Adrian de Soul Bag) découvrent près de Paris le film tiré par Sydney Pollack des deux performances données par Aretha les 13 et 14 janvier 1972 dans une petite église de Los Angeles. C’est la toute première fois que ces images sont diffusées en France. Durant l’été, quelques projections sont organisées en salles et aujourd’hui, ouf, le long métrage est disponible en DVD, accompagné de l’album original et de la traduction d’un livre paru initialement en 2011 (collection 33 1/3, Continuum). Ce dernier pourrait bien être le meilleur jamais écrit sur Aretha Franklin, d’une part, et sur la musique gospel, d’autre part.
Le gospel, d’abord. Je n’avais jamais lu d’explications aussi claires sur les différences entre églises baptistes, pentecôtistes et sanctifiées ; sur James Cleveland, leader de la chorale qui accompagne Aretha ces soirs-là ; ou encore sur les débats qui agitent la communauté afro-américaine et l’industrie musicale avant, pendant et après “Amazing Grace”. Aretha, ensuite. Aaron Cohen a non seulement consulté toute la documentation disponible, mais il a aussi interviewé des acteurs de l’événement aussi essentiels que Chuck Rainey, Bernard Purdie et Alexander Hamilton, respectivement bassiste, batteur et chef de chœur assistant sur “Amazing Grace”. Leurs souvenirs éclairent d’un jour nouveau la genèse d’un disque resté comme le plus vendu de l’histoire du gospel et de la carrière d’Aretha. “Amazing Grace”, enfin. Un chapitre détaille chacun des titres joués ces soirs-là, deux autres racontent le travail de post-production et de promotion qui a suivi, un dernier parle de sa réception. On ne saurait mieux dire.
Malheureusement, l’édition française n’est qu’en partie à la hauteur. Certes, il y a des illustrations, superbes, absentes de la version originale, mais quelques légendes sont incomplètes. Il manque aussi quelques notes de bas de page, des fautes d’accord ont échappé à la relecture et le pianiste Willie Webb est présenté comme une femme. Dommage aussi que l’éditeur n’ait ajouté à l’ensemble ni discographie détaillée, ni “The Complete Recordings” disponibles depuis 1999 et qui viennent de reparaître en vinyle. Pour autant, ce beau coffret est aussi amazing qu’essentiel.
Julien Crué
Note : ★★★★½
Éditeur : GM Éditions. Livre + 1 DVD + 2 CD.
Sortie : 21 novembre 2019